L’orange-bleue peut nuire au climat !

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L’actualité récente nous réserve un fracassant télescopage : alors que le Prix Nobel de la Paix est décerné à Al Gore et au GIEC « pour leurs efforts de collecte et de diffusion des connaissances sur les changements climatiques provoqués par l’homme et pour avoir posé les fondements pour les mesures nécessaires à la lutte contre ces changements », on apprend que les négociateurs de l’orange-bleue seraient arrivés à un accord pour demander à l’Union européenne un objectif minimaliste des efforts belges en matière de gaz à effet de serre.
La demande belge est inacceptable. Elle témoigne en outre du peu de cas que les partis de la future majorité font de leurs engagements pré-électoraux qui prétendaient faire de la lutte contre les changements climatiques une priorité absolue.

En mars dernier, le Sommet des ministres européens arrivait à un accord baptisé 20-20-20 : les pays membres devraient, d’ici 2020, réduire de 20% leurs émissions de gaz à effet de serre en portant la part des énergies renouvelables à 20% et en améliorant d’autant leur efficacité énergétique. La Commission planche actuellement sur la méthode de travail permettant de transposer cet objectif européen en objectifs nationaux. Aucun pays ne connaît donc encore les réductions qui lui seront demandées mais la Belgique plaide déjà pour qu’elles soient minimales ! Selon Etienne Schouppe, l’expert Energie du CD&V, le coût financier serait trop lourd à supporter et un objectif limité à 6-8% serait souhaitable.

Demande inacceptable

Inacceptable, car les scientifiques s’accordent sur le fait que les pays industrialisés devront atteindre 80% de réductions de leurs émissions à l’horizon 2050 et avec un objectif de 6 à 8% d’ici 2020, la Belgique se placerait d’ores et déjà en situation d’échec…

Inacceptable, car la Belgique est un des plus gros émetteurs mondiaux de gaz à effet de serre par habitant et peut d’autant moins fuir ses responsabilités qu’elle dispose de potentiels de réductions très importants.

Inacceptable, car elle ignore ce que tous les rapports d’experts démontrent, à savoir que les efforts financiers non consentis aujourd’hui pour lutter contre le réchauffement climatique se solderont par une facture beaucoup plus élevée pour supporter les conséquences environnementales, économiques et sociales de ce réchauffement.
Par ailleurs, une manne financière permettant de couvrir une part non négligeable de l’effort sommeille à portée de main du futur gouvernement : il lui suffirait d’instaurer sans tarder une taxation sur les centrales nucléaires qui, amorties depuis longtemps, constituent une poule aux ½ufs d’or pour Electrabel.

Inacceptable, enfin, car elle constitue un signal négatif envoyé aux partenaires européens et, par-delà, à l’ensemble des pays devant s’investir dans la lutte contre les changements climatiques. La gravité de la situation ne tolère pas de demi-mesures ni de calculs égoïstes. Il faut tout au contraire faire front uni pour porter des mesures radicales et des efforts ambitieux. A la suite de la Belgique, chaque pays pourrait légitimement faire valoir sa situation « particulière » pour reporter sur les autres le poids de l’effort à fournir.
Cette attitude émergeant régulièrement lors des négociations internationales sur le climat a été suffisamment fustigée que pour ne pas la reprendre à notre compte.
C’est d’autant plus vrai que la Conférence des Nations-Unies sur les changements climatiques qui se tiendra à Bali début décembre pour préparer l’après-Kyoto exigera une position européenne ferme et unanime.

Par-delà ces éléments factuels la rendant inacceptable, la demande des partenaires de l’orange-bleue témoigne du peu de cas que ceux-ci semblent faire de leurs engagements pré-électoraux. Se référant tantôt à Al Gore, tantôt à Nicolas Hulot, tantôt aux travaux du Giec, tous s’étaient accordés sur l’impérieuse nécessité d’agir sans tarder, de manière radicale et volontariste, pour lutter contre les changements climatiques. Des paroles qui semblent aujourd’hui n’avoir engagé que ceux qui y ont cru…

Nous souhaitons donc que le (réjouissant !) Prix Nobel décerné ce jour à Al Gore et au GIEC constitue une efficace piqûre de rappel et que les partis politiques associés aux négociations de l’orange bleue assument pleinement leurs responsabilités en adoptant une position en adéquation avec les exigences de l’urgence écologique. Il en va de la crédibilité du futur gouvernement et de l’avenir de notre planète.

Canopea