Nucléaire… Viva for Doel !

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Parmi les dossiers irradiants de l’année 2015 en matière d’environnement, le nucléaire pointe en pôle position. Il a plus qu’animé les débats parlementaires au fédéral et a fait les choux gras des médias. Qu’ils s’agissent de l’adoption de la loi du 28 juin 2015 qui prolonge de 10 ans la période d’activité des centrales de Doel 1 et 2, des décisions de l’Agence fédéral de contrôle nucléaire (AFCN), de la convention signée le 30 novembre 2015 entre l’Etat belge et l’exploitant des centrales, tout était matière à polémique et rebondissements divers et multiples.

Avant tout, n’en déplaise à certains, force est de constater que les foudres qui se sont abattues sur les responsables politiques suite aux décisions prises ont été le fait d’une sphère nettement plus large que la simple mouvance associative environnementale. En effet, plusieurs avis de la section de législation du Conseil d’Etat n’ont pas manqué d’atomiser les documents qu’elle fut appelée à examiner, que ce soit sur le projet de loi relatif à la prolongation de Doel 1 et 2 ou encore, dernièrement, au sujet la convention conclue entre l’Etat belge et l’exploitant, Electrabel. La fronde a même dépassé notre territoire, d’autres Etats comme l’Allemagne et les Pays-Bas ne manquant pas de s’interroger – pour utiliser un langage diplomatique – sur le degré de fiabilité de certains de nos réacteurs. Ajoutez à cela, une pincée de recours et vous avez réuni là tous les ingrédients d’un feuilleton à succès ou à scandales, libre à vous de choisir ce dont vous êtes le plus friand.

Perversion, nombrilisme… c’est grave docteur ?

Au final, pas une semaine sans qu’on ne nous parle des centrales dans les médias. On en viendrait même à croire qu’elles commencent elles-mêmes à apprécier cette notoriété. En effet, quand ce ne sont pas les procédures en justice ou les débats parlementaires qui font la une, nos doyennes s’improvisent un petit problème technique, dans la partie non nucléaire du réacteur évidemment, pour faire parler d’elles au lieu de se faire un peu oublier. Pas fute-fute les tatas. On finirait presque par croire qu’elles aiment se faire flageller. Ahhh ces coquines… Et narcissiques de surcroît ! Sitôt la presse fait-elle un focus sur l’une qu’une autre se rappelle à nos bons/mauvais souvenirs : « hé les amis, moi aussi je suis vieille et déficiente». Une étude scientifique approfondie permettrait de voir si le communautaire ne s’inviterait pas non plus dans les débats : Doel, Tihange chacun son tour.

Plus un rond, faites un don !

Problème d’alternateur, incendie, « micros » fissures tout y passe… Au-delà des différents problèmes survenus tout au long de ces douze derniers mois, et même si certains affirment que les incidents ne sont pas plus nombreux que les autres années, la question est donc de savoir si, vu leur âge avancé, nos bonnes vieilles centrales ne deviendraient pas séniles. Elles en viendraient presqu’à susciter la pitié. Contraint de devoir débourser autour de 700 millions d’euros pour les travaux inhérents à la prolongation des réacteurs de Doel 1 et 2, l’exploitant serait-il sans le sous pour changer un alternateur déficient ?

A l’instar de certains évènements pleinement légitimes, faudra-t-il imaginer à terme un « Viva for Doel » ? Allez soyons fous et évadons-nous un instant en imaginant trois stars internationales que nous appellerons pour l’occasion Marie-Christine, Jan et Gérard lesquels seraient enfermés dans une cuve pendant 4 jours (vu les micro-fissures qui permettraient la libération partielle de la radioactivité, il y aurait moyen de survivre durant cette période sans engager le pronostic vital des participants). Leur objectif : récolter des dons de toute nature pour entretenir les centrales : quelques euros, truelles, béton à prise rapide de préférence, pastilles d’iode ou séjour à la mer offert, etc. Des reportages sur le terrain sur la nécessité de bien entretenir les centrales en direct de Fukushima. Une quotidienne télévisée présentée par une bombe atomique (le jeu de mot est fissile, d’accord !). Des chansons revues et corrigées pour assurer l’audience : le mestral gagnant ou encore, histoire de sensibiliser les jeunes, pourrait-on imaginer la reine des neiges (forcément soucieuse du réchauffement climatique), nous interpréter une nouvelle version de libérée délivrée laquelle serait réécrite en fissurée, irradiée ? Des bandes annonces télévisées d’une organisation que nous appellerions pour l’occasion le formol nucléaire seraient diffusées encourageant l’appel à dons.

Prolongation de Doel 1 et 2 jusqu’en 2042 ?

Qu’on le veuille ou non, on peut reconnaître un mérite au Gouvernement fédéral : celui de vouloir agir avec cohérence. Nucléaire, report de l’âge légal de la pension à 67 ans… même combat : ON PROLONGE même s’il est vrai que, pour la seconde mesure et à juste titre, des tempéraments sont prévus en principe pour les métiers qualifiés « à risques ». Probablement inutile d’évoquer d’éventuels risques dans le cas des centrales tant elles semblent respirer la santé. Et certains électrons libres de claironner qu’au-delà de 2025, le nucléaire devrait perdurer. Mais c’est que nos mamys vont réellement atteindre l’âge de 67 ans à ce rythme-là. Enfin, pas si sûr vu qu’une autre « personnalité » politique prévoit la fin de la Belgique en 2025. Faut-il y voir nécessairement des velléités séparatistes ou tout simplement un constat objectif, qu’à cette époque, il y en aura peut-être bien une qui aura fini par sauter ? Question ouverte bien évidemment !

Avec une politique du « on les maintient toutes en activité » et bien que la simple évocation puisse susciter la consternation, on en finirait par croire que le Gouvernement opte pour l’option de maintenir l’activité des 7 réacteurs au cas où l’un ou plusieurs d’entre eux viendrai(en)t à passer l’arme à gauche (difficile à accepter pour un Gouvernement de centre droit). A ce rythme-là, la transition voire même une ébauche de transition ce n’est pas pour demain.

En fin de compte, dans ce dossier, contexte oblige, deux tendances que l’on pourrait qualifier de sécuritaires s’affrontent :

 d’un côté, tout en étant conscient que le modèle de la bougie est révolu, un souci d’assurer la sécurité des citoyens et la protection de l’environnement privilégiant la fin du nucléaire dans le cadre de la transition énergétique ;

 de l’autre, une volonté de vouloir garantir la sécurité d’approvisionnement en considérant que le degré de fiabilité des centrales est suffisant pour permettre leur exploitation.

Une chose semble certaine : que l’on soit « pro » ou « anti », les arguments respectifs semblent difficilement conciliables et, telles deux parallèles, ne se rencontreront jamais.