Changements climatiques: à qui profite l’immobilisme?

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Dans une tribune publiée ce mardi par “L’Echo”, Rudi Thomaes, administrateur-délégué de la Fédération des entreprises de Belgique (FEB), met en garde contre une position européenne trop «positive» lors des négociations sur la lutte contre les changements climatiques qui viennent de débuter à Cancun. Le patron des patrons belges déclare notamment qu’«introduire maintenant de manière unilatérale une réduction de 30% (des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2020 par rapport à 1990 – NDR) représente pour nos entreprises un tel pas de géant que nous devrons supprimer et délocaliser des usines et des emplois».
Pour les associations environnementales (Fédération Inter-Environnement Wallonie, WWF, Greenpeace et Bond Beter Leefmilieu), cet argument est faux car il n’y a nul «pas de géant» à franchir. En effet, aujourd’hui déjà, une réduction de 17 % a été réalisée. Se limiter à 20 % de réduction signifierait par contre que notre industrie n’aurait plus aucun effort à fournir dans les 10 années à venir ! Cela nous coûterait toute notre crédibilité et coulerait l’espoir de pouvoir contrôler les changements climatiques.
Les associations considèrent en ce qui les concernent que la prise de leadership dans la lutte contre les changements climatiques ne constituera pas un handicap mais au contraire un atout pour l’économie européenne.

A l’opposé des affirmations de l’administrateur-délégué de la FEB, plusieurs études démontrent qu’un engagement unilatéral de réduction de 30% des émissions de gaz à effet de serre en Europe n’aurait qu’une influence minime en terme de délocalisations, lesquelles n’affecteraient que quelques sous-secteurs. L’argument de la délocalisation et de perte d’emplois n’est donc pas fondé.

La vraie raison pour laquelle certaines grandes entreprises – dont la FEB se fait ici la porte-parole – tiennent à la situation actuelle réside dans le fait qu’elles ont reçu des droits d’émission de gaz à effet de serre gratuits et qu’elles espèrent les revendre avec un beau bénéfice après 2012. Or, une hausse des ambitions de réduction anéantirait ces gains inespérés.

Une étude de la Commission européenne a par contre mis en exergue les avantages que l’Union retirerait d’un tel engagement. Non seulement elle occuperait une position de pointe dans l’économie low-carbon vers laquelle le marché mondial glissera inexorablement mais elle en retirerait des bénéfices considérables en terme d’indépendance énergétique, d’innovation technologiques et de… création d’emplois.

Heureusement, de nombreuses entreprises, dont plusieurs actives en Belgique, se sont publiquement prononcées en faveur d’un passage unilatéral à 30% de réduction des émissions au niveau européen… Ces entreprises représentent l’économie du futur. Si la FEB ne change pas son fusil d’épaule, nos industries risquent fort d’appartenir, elles, au passé,

Les arguments avancés par Rudi Thomaes servent une position frileuse qui n’a pas changé d’un iota depuis la Conférence de Copenhague et d’autant moins défendable que les chiffres attestent que l’objectif initial de réduction de 20% sera atteint sans difficultés ni coûts particuliers. L’Europe a d’ailleurs d’ores et déjà réduit ses émissions de 17% par rapport aux niveaux de 1990.

Les associations environnementales invitent donc le monde de l’entreprise à changer sa grille d’analyse et à considérer les besoins de la lutte contre les changements climatiques comme une opportunité et non comme une contrainte. L’avenir appartiendra à ceux qui le comprendront les premiers…

Canopea