De la technologie utile à la technologie gadget : la dérive de la téléphonie mobile

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Peut-on mettre en péril la santé des citoyens au nom de l’évolution technologique ? Jusqu’où un service remplit-il réellement une fonction d’utilité publique? Autant de questions et d’inquiétudes que suscitent, au sein de la population, le développement des technologies « sans fil » et en particulier de l’UMTS, la troisième génération de téléphonie mobile qui ouvre la porte à une série de nouvelles applications (TV, Internet, GPS, etc.)

Considérer la téléphonie mobile comme un service d’utilité publique permet de légitimer totalement le développement de ce secteur et de justifier le fait que les rayonnements électromagnétiques générés par les appareils et les antennes soient imposés à la population. Or, de nombreux citoyens s’opposent totalement au développement de l’UMTS car l’apport de cette nouvelle technologie est, selon eux, purement ludique et commercial. Ce « plus » est donc dérisoire et ne justifie en aucun cas l’augmentation des risques de nuisances pour les riverains.

Les instruments aptes à la détection d’un problème sanitaire lié au développement massif de ces technologies sont aujourd’hui limités et ne pourraient renseigner qu’avec retard sur les éventuelles conséquences néfastes de l’exposition généralisée d’une population.

Dès lors, qu’attend-on pour appliquer le principe de précaution ?
Par deux fois, en 2000 et en 2005, le Conseil supérieur de la santé a recommandé au Gouvernement fédéral d’adopter une norme plus exigeante (3V/m à 900 MHz) que celle actuellement en vigueur en Belgique (20.6V/m à 900 MHz). La deuxième fois, en 2005, le Conseil de la santé a recommandé d’approuver le principe ALARA (« As Low As Reasonably Achievable »). En juin 2008, le Conseil a constaté que, concernant l’exposition aux micro-ondes, il existe un certain nombre d’indications incitant à la prudence. A aucune reprise, l’Etat fédéral n’a suivi ces recommandations.

Selon le SCENIHR (Comité scientifique des risques sanitaires émergents et nouveaux de la Commission européenne), il existe des « zones d’ombre » auxquelles il convient de prêter attention. On peut citer par exemple l’utilisation fréquente et prolongée du GSM par les enfants.
Les recommandations sanitaires émises lors de la consultation lancée récemment par le Ministre wallon du développement territorial sur l’implantation des réseaux de téléphonie mobile, incitent également à une plus grande prise en compte du principe de précaution. Les acteurs consultés insistent également sur  la nécessité de :

 sensibiliser et d’informer le public sur les risques encourus par l’usage excessif des technologies sans fil.

 décourager l’usage du téléphone mobile par les enfants et les adolescents de moins de 16 ans 

 mettre sur pied un code de déontologie sur le plan de la publicité pour le GSM et les technologies sans fil. En particulier, interdire la publicité visant à – encourager les familles à supprimer leur ligne fixe au profit du GSM ou à encourager les jeunes à téléphoner.

Pour de nombreux représentants de la société civile, tout le monde connaît les risques engendrés par un tel développement des technologies sans fil, mais personne ne réagit car tout le monde y trouve son compte : les lobbies, les gouvernements, les industriels, et le citoyen qui, pour reprendre les propos d’un riverain d’antenne: « gobe avidement toutes les nouveautés qu’on lui propose au point de ne plus pouvoir s’en passer ».
Certains acteurs sociétaux sont demandeurs d’une réflexion de fond sur la question (quel modèle de société, quelles valeurs, quelles priorités ?) mais ne trouvent pas, au niveau politique, d’interlocuteur intéressé par ces remises en question fondamentales. Et pour cause, le système décisionnel actuel, basé essentiellement sur une gestion plus efficace qu’efficiente de la situation existante ne bénéficie ni de l’espace ni des ressources nécessaires à ce type de démarche.