L’écologie, otage du marketing

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Il ne se passe plus une journée sans communication sur le réchauffement climatique. Vu les menaces planant sur l’écosystème planétaire, nous sommes les premiers à nous en féliciter. Par contre, là où nous sommes beaucoup moins enthousiastes, c’est à propos de la récupération de l’urgence écologique (et climatique en particulier) comme argument marketing.

L’industrie a bien compris que l’environnement au lieu d’être une contrainte, pourrait devenir un avantage concurrentiel pour préserver ou conquérir de nouveaux segments de marchés. Mais comme la réduction des nuisances environnementales demande des investissements parfois conséquents, le monde industriel a une fâcheuse tendance à se cantonner à une simple communication sur le sujet, sans rien changer à son activité. Ce genre de messages devenus quasi quotidiens s’appelle le « greenwashing » ou « maquillage vert ». Le recourt à cette « technique » est davantage utilisé par les entreprises dont l’existence même se fonde sur une production éloignée des principes de développement durable tels les géants du pétrole, de la chimie, de l’automobile, des déchets, …

Tout est bon pour vendre

Exemple par l’automobile. Chaque constructeur rivalise aujourd’hui sur le créneau « écologique ». Selon les cas, le véhicule est présenté comme « éco », « propre », « bio » ou encore « vert ». Certaines marques poussent même le bouchon jusqu’à affirmer dans leur pub que l’achat de leur dernier modèle permet de lutter contre le réchauffement climatique. Le vide réglementaire actuel permet aux firmes de mettre en avant des qualités écologiques même hypothétiques. A tel point que certains pays commencent à réagir. En Norvège, depuis le 15 octobre, les constructeurs automobiles n’ont plus le droit d’utiliser les adjectifs « propre », « vert » ou « respectueux de l’environnement » pour leurs voitures. Sur quelle base ? Le raisonnement est simplissime. Chaque modèle pollue. La seule distinction possible se mesure aux performances. Certains modèles sont meilleurs, aujourd’hui, puisqu’ils disposent de la technologie dernier cri. Mais demain, ils seront dépassés …

Le fameux effet rebond

Au niveau planétaire, les progrès environnementaux de l’industrie sont largement compensés par l’augmentation du nombre total de produits mis sur le marché. A chaque fois qu’on a réussi à économiser telle ou telle matière première pour produire un bien ou un service, l’effet de ce gain d’« éco-efficience » a été plus que compensé par un accroissement encore plus important des quantités produites. Revenons à notre auto. Si les constructeurs progressent d’un côté dans l’optimisation des moteurs en réduisant la consommation en carburant, ils augmentent de l’autre la pollution par la croissance continue du nombre total de voitures mises en circulation. En 2007, nous avons dépassé les 5 000 000 véhicules automobiles en Belgique, alors que nous en avions seulement 2 000 000 au début des années 70 ; sans compter l’installation d’une série de nouveaux gadgets plus ou moins utiles, ainsi que la croissance de la vente de (plus en plus) grosses cylindrées équipées de para-buffles dont l’utilité semble assez discutable sur nos routes urbaines.

C’est grave, docteur ?

En quoi ce maquillage vert est-il finalement si gênant puisqu’en réfléchissant un peu, il est possible de démonter un à un de tels arguments de vente ? Parce que cette communication empêche le consommateur d’acheter des biens véritablement respectueux de l’environnement. L’image verte communiquée ne garantit en rien le contenu écologique du produit visé. C’est même une concurrence déloyale pour les firmes qui investissent réellement dans la qualité environnementale de leurs produits mais qui n’ont pas de grands moyens publicitaires.

Comment faire le tri ?

Tout simplement, en restant vigilant face à cette « information » verte et en apprenant à décortiquer les étiquettes et les messages publicitaires. Les miracles n’existent pas et encore moins en environnement. Si l’analyse des arguments écologiques demande une attention supplémentaire au début, cela peut rapidement se transformer en jeu. Ne nous leurrons pas, le moyen le plus sûr de réduire la pollution reste plus de jamais le geste préventif : préférer le plus possible les déplacements doux et en commun à la voiture individuelle, l’eau du robinet aux canettes de sodas, etc. Sous cet angle, on comprend aisément que la seule véritable voiture « verte » actuellement disponible sur le marché, c’est … le vélo.

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