La Directive Déchets ou l’art belge de se faire tirer l’oreille

  • Auteur/autrice de la publication :
  • Post category:Ressources
  • Temps de lecture :4 min de lecture
You are currently viewing La Directive Déchets ou l’art belge de se faire tirer l’oreille

Cela n’étonnera pas grand monde d’apprendre que la Belgique est une nouvelle fois tancée par la Commission Européenne pour sa non-transposition d’une directive environnementale. Cette fois, c’est la Directive Cadre sur les Déchets qui fait l’objet de la critique de la Commission.

La Directive Cadre Déchets (dite DCD, ou Directive 2008/98/CE[[Attention, la lecture de cette niews peut entrainer de sérieux maux de tête.]] ) a pour objectif général d’améliorer la gestion des déchets au sein de l’Union et de la tirer vers le haut de la hiérarchie des déchets[[Aussi appelée échelle de Lansink]], en visant d’abord la prévention et la réutilisation, puis seulement le recyclage et l’élimination. En effet, la situation concernant le recyclage est très diverse au sein de l’Union Européenne, avec des bons élèves comme la Belgique et de plus mauvais dans certaines régions de l’Europe de l’Est. Par contre, en matière de prévention, aucun pays ne peut encore se targuer d’avoir mis en place une politique efficace de prévention des déchets: on observe encore et toujours une corrélation certaine entre la richesse d’un pays et la quantité de déchets qu’y produisent ses habitants. La mise en ½uvre de la Directive Cadre Déchets doit donc permettre aux Etats Membres de paver le chemin vers la moindre production de déchets, via la mise en place de plans de prévention et de gestion des déchets. Elle fixe également des objectifs de recyclage pour certains flux de déchets (déchets ménagers et de construction) mais, vu la disparité des performances des différents Etats Membres sur le sujet, ces objectifs a minima sont modestes: 50% des métaux, verre, papiers et plastiques issus des déchets ménagers (mis à part le plastique, selon les données Fost-Plus, la Belgique est déjà bien au-delà), et 70% des déchets de construction en 2020.

A priori, pas de stress donc pour la Belgique, qui n’a pas de raison de ne pas transposer cette directive dans les délais prévus, soit début décembre 2010. Mais non. Encore une fois, la Belgique se fait remarquer par son retard: cette fois, ce sont les trois régions qui ont reçu un avertissement de la Commission, avec un délai de deux mois pour se mettre en règle et assurer cette transposition.

Selon les réponses reçues par la Commission, la Région de Bruxelles-Capitale a prévu une transposition pour janvier 2012, tandis que la Flandres et la Wallonie ont annoncé une transposition pour novembre 2011. Mais en ce début octobre, les textes qui doivent assurer cette transposition n’ont encore fait l’objet que d’une première lecture au Gouvernement Wallon…

Qu’importe, peut-on se dire: si le texte est ambitieux et porte avec force une politique visant réellement la prévention, et l’atteinte d’objectifs de recyclage intéressants pour l’environnement et l’économie, l’attente en vaut la peine. Mieux vaut un bon texte en retard, qu’un mauvais à temps. Malheureusement, pour la Wallonie, ce ne sera pas le cas: les textes présentés au Gouvernement sont une transposition fidèle et minimaliste de la Directive Cadre Déchets. Or si cette directive est ambitieuse pour les pays d’Europe de l’Est, elle l’est nettement moins pour la Belgique, traditionnellement surnommée le bon élève de l’Europe en matière de déchets. Il ne faut donc pas attendre des miracles de cette transposition.

Le seul espoir reste les plans de prévention et de gestion des déchets (aussi connus sous le nom de Plan Wallon des Déchets 2020), qui devraient être soumis à enquête publique en 2012, pour espérer aller plus loin. Mais ce ne sera de toute façon qu’un pis-aller puisque ce Plan Wallon des Déchets n’aura pas de valeur légalement contraignante: les objectifs qui pourraient y être fixés ne seront pas contraignants et n’auront donc qu’un caractère incitatif. Il restera juste à espérer que tous les acteurs s’y tiennent.

Avec tout ca, on est en droit de se demander si à l’horizon 2020 la Wallonie ne risque pas de quitter son statut de bon élève et de plutôt chausser le bonnet d’âne européen… Dommage pour l’environnement, et dommage aussi pour l’activité économique générée par un meilleur traitement des déchets.