Les parapluies ne suffisent plus

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Inondations et coulées de boues sont de retour sur nos écrans, à l’heure du JT.
Ces inondations-là surviennent quand une grande quantité de pluie tombe dans un laps temps trop court pour que le sol, aménagé ou non, puisse l’absorber. Les terres dévalent des terrains nus, les avaloirs ne suivent plus, les routes concentrent les eaux et deviennent de véritables torrents. Ces inondations se distinguent des débordements de cours d’eau par le fait que la survenue d’une pluie aussi abondante est fort imprévisible. Pour les crues des rivières, les niveaux d’eau sont suivis en continu, et des cotes d’alertes permettent d’informer les autorités et d’organiser les mesures à prendre vis-à-vis des habitants.

Ces pluies intenses ont toujours existé. Mais :

 leurs effets sont accentués par la manière dont l’urbanisation et l’agriculture ont modifié les surfaces sur lesquelles tombe la pluie, favorisant le ruissellement et la concentration en une crue torrentielle. Les conséquences sont d’autant plus importantes que la zone est densément habitée. L’agence régionale de l’environnement de Haute Nomandie a publié une brochure consacrée au sujet et note que le phénomène touche des zones de plus en plus étendues où « de mémoire d’homme, on n’avait jamais vu ça ».

 l’analyse de la fréquence des évènements pluvieux supérieurs à 40 mm/24 h montre pratiquement un doublement au cours de la dernière décennie par rapport aux décennies précédentes en Haute Normandie. Ces chiffres appuient ce que les scientifiques affirment depuis plusieurs années maintenant en matière d’impacts attendus des changements climatiques : nos régions seront soumises plus souvent à des évènements pluvieux plus intenses[[Feyen et al. 2007. Climate change and floods in Europe. International Workshop on Climate Change Impacts on the Water Cycle, Ressources and Quality. European Commission EUR 22422.]] .

Calamités traumatisantes, dégâts et sommes en jeu obligent : ne rien faire est impossible. D’autant plus que, comme le fait remarquer l’ Agence européenne de l’environnement, les conséquences concernent aussi l’accroissement des risques de pollution. La présence de réseaux uniques de collecte des eaux, mélangeant eaux usées et eaux pluviales, a toujours été un problème par temps de pluie, les stations d’épuration n’ayant pas la capacité de traiter les volumes entrants, ni de les stocker au delà d’une certaine quantité. Les rivières reçoivent donc régulièrement des eaux non traitées, certes diluées, mais dont l’impact sur l’écosystème n’a jamais réellement été étudié. Les pluies très intenses génèrent également des débordements d’égouts (taques qui se soulèvent, etc.), guère plus réjouissants. Concevoir différemment les réseaux de collecte et le fonctionnement des déversoirs d’orage fait partie des stratégies d’adaptation au changement climatique, dont une récente nIEWs signalait l’absence tant au niveau fédéral qu’au niveau régional wallon.

Les pistes d’adaptation existent déjà en ce qui concerne la gestion des « inondations flash » comme les appellent les anglo-saxons. Elles touchent aux techniques de « l’hydraulique douce », dont l’objectif est de favoriser l’infiltration de l’eau, de réduire le volume et la vitesse des ruissellements résiduels. L’aménagement et l’entretien de fossés herbeux par exemple, voire de noues avec un cordon d’arbres, allient les bénéfices de frein au ruissellement à ceux d’une épuration naturelle.

Malheureusement, en matière « d’adaptation », et à l’échelle européenne, il y a de grands risques de voir se développer des projets qui n’intègrent pas les leçons du passé. On parle de plus en plus de détournements de fleuves, de transferts massifs d’eau, de barrages… L’EEA constate que les gouvernements des pays méditerranéens, ayant eu à envisager de coûteux transferts par bateau (Espagne, Chypre) lors des sécheresses récentes, sont maintenant prêts à tout pour disposer d’eau. La gestion de l’eau en agriculture et principalement l’irrigation sont au coeur de la question. Et nous ne devons pas nous exclure de ces problématiques : si nous n’irriguons pas ou peu chez nous, nous consommons par contre de nombreux produits issus de l’irrigation. Les incitants européens à la production agricole sont épinglés par l’EEA : ils ont concouru jusqu’il y a peu au développement de pratiques non durables. Et de rappeler ce que le WWF avait montré dès 2005 : l’équivalent de la consommation de plus de 16 millions de personnes est utilisé en Espagne pour produire des surplus aux quotas européens.

« En fin de compte, l’adaptation signifie reconsidérer le lieu et la façon dont nous vivons aujourd’hui et à l’avenir.[S[i le puits se tarit – L’adaptation au changement climatique et le problème de l’eau – ]]»