Les ressorts du déni climatique

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La science s’accorde, avec un degré de certitude très élevé sur l’origine humaine du réchauffement climatique : les observations sont cohérentes avec les lois physiques, qui permettent de comprendre que la molécule de CO2 absorbe le rayonnement infrarouge et renforce de ce fait l’effet de serre.

D’un point de vue physique, on a à faire aux mêmes lois que celles qui sont en jeu lorsqu’une molécule d’eau absorbe le rayonnement micro-ondes dans le four du même nom, réchauffant par là-même mon chocolat chaud. Mécanisme scientifiquement banal et archi connu.

Pourtant, le déni climatique continue à être véhiculé sous différentes formes : tantôt certains affirment qu’il n’y aurait pas de réchauffement, tantôt (parfois les mêmes !) que le réchauffement existe mais ne serait pas dû à l’homme et au CO2, tantôt que même s’il y a un réchauffement du à l’homme celui-ci serait en fait bénéfique.

Comment comprendre cette attitude qui semble peu cohérente et peu rationnelle ?

En matière de climat, les implications sont, malheureusement, nettement plus graves et inquiétantes que dans le cas de la tasse de chocolat qui passe au micro-ondes. Et personne n’aimant les mauvaises nouvelles, il est normal de trouver dans la population des gens qui restent dans le déni.

Le déni est une réaction humaine extrêmement banale et naturelle, face à une réalité trop dure pour être acceptée. Dans certaines situations traumatisantes, comme le deuil ou la maladie incurable, le déni peut constituer une protection mentale nécessaire, présentant une certaine utilité à court terme pour l’équilibre de l’individu. Par la suite, il est sain que l’individu puisse trouver les ressources pour accepter la réalité et y faire face.

Dans le cas des changements climatiques, outre les implications en terme de remise en cause de notre mode de vie, qui ne sont pas minces à accepter, on trouve très couramment chez ceux qui refusent le plus ostensiblement les conclusions de la science un attachement viscéral à une vision idéologique du monde, souvent centrée sur une idéalisation du capitalisme et de la croissance, vision qui serait elle aussi remise en cause par l’acceptation des limites physiques de la planète (dont le climat est un exemple).

On voit bien, dans les trois formulations du déni climatique reprises ci-dessus que l’important n’est pas, pour leurs tenants, de comprendre le fondement scientifique du phénomène, mais bien de raconter une histoire qui permet de continuer à vivre « comme avant ». Il s’agit alors d’un enfermement mental durable.

Les voix du déni trouvent un public en prétendant que tout va bien. Un peu comme lorsque cent docteurs diagnostiquent un cancer, mais qu’un charlatan affirme que le cancer, ça n’existe pas, ce charlatan trouve forcément un public, trop heureux d’entendre que le cancer n’est qu’une invention des docteurs pour s’en mettre plein les poches.

Au-delà de la gloriole personnelle que cette posture apporte, au-delà de gains matériels avérés1 pour certains « scientifiques » qui ont été « achetés » par l’industrie pétrolière, l’attitude de déni face à la réalité du réchauffement climatique anthropique tire généralement son ancrage le plus profond dans une vision du monde dont les individus n’arrivent pas à faire le deuil.

Il faut donc s’attendre à devoir continuer à composer avec le déni climatique.

  1. [Le cas du chercheur « mercenaire » Willie Soon, notamment, a été mis au jour en 2015 : http://www.lemonde.fr/planete/article/2015/02/23/un-climatosceptique-de-renom-demasque_4581570_3244.html]