Résistance !

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Des événements comme ceux qui se sont passés cette semaine à Bruxelles ou il y a quelques mois à Paris sont à ce point violents qu’ils nous laissent souvent (au minimum) désemparés.

Le besoin de comprendre est très présent et les réponses sont souvent et inévitablement limitées, insuffisantes… Il en est une, parmi d’autres certainement, que l’on peut considérer comme éclairante : le tout récent livre d’Antoine Peillon, Résistance ! Ou: l’art renouvelé de la résistance intellectuellement armée. [[Antoine Peillon, Résistance !, Seuil, mars 2016, 320 p, 19 euros.]] Qu’est-ce qu’être en résistance aujourd’hui ? Contre quoi, contre qui, avec qui, pour quoi ?

Quelques brefs extraits de ce livre passionnant pour vous mettre l’eau à la bouche.

Partant du constat (très très étayé en ce qui concerne la France) que les démocraties occidentales marchent sur la tête – la très récente décision de l’Europe relative à la politique migratoire suffirait à justifier ce constat -, Antoine Peillon fait sien les mots d’Edgar Morin : « Aujourd’hui, contre quoi faut-il résister ? Il faut résister contre deux barbaries. Une barbarie que nous connaissons tous, qui se manifeste par les attentats, par les fanatismes les plus divers. Et l’autre barbarie, qui est froide, glacée, qui est la barbarie du calcul, du fric et de l’intérêt. Dans le fond, face à ces deux barbaries, tout le monde devrait, aujourd’hui, résister”.

Et aujourd’hui, pour quoi faut-il résister ? Car « la Résistance n’est pas – elle n’a jamais été – principalement contre. La Résistance est aujourd’hui comme elle l’était dans les années les plus sombres de l’Occupation, unanimement pour la révolution, la liberté, l’égalité, la fraternité, le bien vivre (…) la dignité humaine, la durabilité du monde, (…) le bien commun et la démocratie, en bref, pour les jours heureux ».

Et l’auteur d’analyser et d’en appeler à tous les mouvements de désobéissance civile qui émergent (d’Occupy Wall Street aux ZAD (Notre-Dames-des-Landes, barrage de Sivens…) en passant pas les faucheurs d’OGM et autres Déboulonneurs de pub) mais aussi de souligner la vertu exemplative des multiples initiatives souvent locales qui se mettent aujourd’hui sur pied. Ce livre est d’ailleurs à ce titre un excellent complément au film aux qualités unanimement reconnues Demain.

Au centre de cette pensée on retrouve la catégorie politique du « commun » qui serait à même de battre en brèche la « raison » (?) néolibérale, le retour des nationalismes, les fermetures de frontières, les exaspérations xénophobes, communautaires et fondamentalistes…

Et quelles sont les pistes proposées par ces mouvements de Résistance, quel est le Cap actuel à cette Résistance ? Trois lignes de force : « La liberté personnelle, refondée par l’individuation ou la subjectivation[[lire à ce propos : Cynthia Fleury, Les irremplaçables, Gallimard, 2015, 220 p, 17 euros]], la responsabilité fraternelle vis-à-vis de tous les êtres humains, sans descrimination d’origine (Cosmopolitisme) et la sauvegarde de la planète entrée dans l’âge de l’anthropocène

Résumer un tel livre est nécessairement frustrant. Mais, comme le souligne très à propos Jean-Marie Durand dans Les Inrocks, « Il serait tentant et facile de voir dans ce sombre réquisitoire de son époque et cette invitation à tout changer le signe d’une naïve utopie, dont les êtres cyniques et désenchantés ne cessent de se gausser depuis des années au nom d’un suspect principe de réalité. On peut au contraire lire dans ces pages insurgées et calmes à la fois le symptôme d’un mouvement intellectuel général pour lequel la Résistance n’est plus qu’un simple mot ou un seul souvenir, mais un horizon vital et fatal. »

Ce livre est en outre une édifiante recension de tout ce qui a pu s’écrire d’un peu fondé sur le sujet ces dernières années.

A lire de toute urgence donc.