Tuer ses voisins à petits feux

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Cultivant une mauvaise habitude en vigueur dans beaucoup de patelins de Belgique, plusieurs habitants de Meeffe (commune de Wasseiges, en province de Liège) ont, durant des décennies, brûlé la quasi totalité de leurs déchets au fond de leurs jardins… Les filières pour se débarrasser de ces déchets existent pourtant et sont même de plus en plus diversifiées et performantes.
Cette incinération sauvage et sur une longue période des ordures ménagères mais aussi de produits dangereux tels que des lattes en PVC, des résidus de cosmétiques… n’est pas sans conséquences. Elle génère des pollutions sérieuses tant du sol que de l’air et le voisinage en souffre directement. Dioxines, COV[[COV : certains composés organiques tels que les aromatiques, les oléfines provoquent des irritations des yeux. Les aldéhydes sont de puissants irritants des muqueuses. Certains COV tels que le benzène, sont cancérigènes.]] comme le benzène, HAP [[ Les Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques (HAP) liés à certains phénomènes de combustion. Certains d’entre eux sont reconnus très cancérigènes comme le BaP (Benzo-a-pyrène)]] ; furannes, métaux lourds… sont ainsi libérés dans l’atmosphère.
A Meeffe, cela fait 30 ans que cela dure, en toute impunité. Pourtant, les conséquences sanitaires de ce comportement y sont édifiantes.

Atteints du « syndrome industriel biochimique »

Plusieurs voisins de ces « incinérateurs-fous » souffrent de maladies des voix respiratoires et même de « syndrome industriel biochimique ». Des médecins et services d’urgence des environs ont reconnu que leurs organismes avaient atteint une dose limite d’absorption et que pour se prémunir d’autres intoxications (en prenant l’air de leur jardin, en mangeant les légumes de leur potager, en jouant dans les rues du quartier…), ils avaient développé des mécanismes instinctifs de protection : « blocage » des poumons pour empêcher toute inhalation (provoquant notamment des syncopes), production de plaques rouges sur la peau pour « l’imperméabiliser » créant des dermatoses, eczémas aigus etc.
Conséquence : ces gens sont interdits de séjour chez eux, obligation d’éloignement ! Oui, oui, vous avez bien lu !!!

Un infraction environnementale reconnue

Une législation existe pourtant, qui précise qu’il est interdit de se débarrasser d’un déchet en l’abandonnant n’importe où, en l’éliminant (en le brûlant ou en l’enterrant) ou en le cachant (dans le fond d’un bois ou dans un ruisseau…).

Depuis peu, le décret sur les infractions environnementales[[Décret du 5 juin 2008 relatif à la recherche, la constatation, la poursuite et la répression des infractions et les mesures de réparation en matière d’environnement, M.B. du 20 juin 2008.]] en Région wallonne est venu renforcer la possibilité pour les Bourgmestres de faire constater et sanctionner toute infraction environnementale. Et brûler des déchets dans son jardin EST une infraction environnementale.

Non assistance à personne en danger

Les riverains « écartés » espéraient donc être entendus et défendus en vertu de ce texte. Et comme à la police de l’environnement mais aussi à la Région wallonne, tant chez le Ministre de l’environnement que chez le Ministre de la santé. tout le monde semblait s’accorder pour dire que c’est au Bourgmestre d’agir, que c’est sa responsabilité qui est engagée. et qu’il est en état de sanctionner, c’est tout naturellement vers celui-ci qu’ils se sont tournés. En vain. En Conseil communal, le Bourgmestre se défend et « explique » sa passivité : « J’ai reçu trop peu de plaintes ».

Les riverains constatent que la police locale, appelée à chaque feu, ne se déplace pas ou refuse de verbaliser précisant qu’elle a reçu la consigne de dialoguer.

Nous avons contacté la commune qui dit faire son possible et «avoir tout mis en oeuvre pour que ça cesse». Vérification faite, elle a en effet publié plusieurs articles, et distribué des toute-boîtes rappelant l’interdiction de bruler ses déchets dans son jardin. Mais peut-on considérer cela comme suffisant?

Quoi qu’il puisse en être, et sur base des différents éléments en notre possession, il nous semble qu’il est temps que ces incivilités s’arrêtent, que les pollueurs soient sanctionnés et que les victimes soient dédommagées.

Accès à la justice…

Faudra-t-il que les riverains, outre les frais médicaux, la souffrance, la peur de maladies irrémédiables, le sentiment d’abandon, de laissés-pour-compte, en viennent à déposer plainte pour non assistance à personne en danger ? Ou que face à l’inertie de la commune, comme le rappelle le ministre de l’environnement [[Commission de l’environnement du Parlement wallon, 3 mars 2009]], les riverains fassent appel à la Députation provinciale, le Gouverneur, le Ministre ayant la tutelle des communes ? Et que, si les agents de police locales ne dressent pas un PV des infractions constatées, les riverains s’adressent au chef de zone, au Procureur du Roi voir au Comité P ou à l’inspection générale des Services de Police ?

Il est évident qu’ayant découvert ce dossier hallucinant, notre Fédération va, via ses experts et son service juridique, étudier plus précisément les éléments de ce dossier et envisager le plus rapidement possible la réaction la plus efficace pour mettre fin à cette histoire.

Canopea