Directive européenne sur l’air: un recul pour la santé

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Le 14 avril a été adoptée une nouvelle directive relative à la qualité de l’air. On attendait un texte fort. Mais, à l’analyse, aucune nouvelle norme ambitieuse ne va être imposée aux Etats membres, et la directive donne même la possibilité de reporter certains des objectifs de qualité de l’air prévus dans sa version antérieure. Déception donc.

Au départ, cette directive a été imaginée dans le but de simplifier la législation européenne dans le domaine de l’air. Il s’agissait de remplacer 4 directives et une décision du Conseil par un seul texte. Et en effet, il reprend, sans les modifier, les règlements relatifs à l’évaluation et la gestion de la qualité de l’air ambiant, l’échange réciproque d’informations et de données entre les Etats membres et les limites de certains polluants dans l’air ambiant, comme les dioxides d’azote et de soufre, le plomb, le monoxyde de carbone, l’ozone et le benzène. Mais de nouvelles dispositions sont introduites pour les particules fines ( PM-2,5 et PM-10), dont les effets néfastes pour la santé sont aujourd’hui bien connus.

Depuis la présentation de la stratégie thématique en matière de pollution atmosphérique par la Commission il y a 3 ans, les chercheurs européens ont tenté de convaincre les institutions communautaires que la nouvelle norme sur les particules fines (PM-2,5) ne devait pas dépasser 15 microgrammes par mètre cube, voire 10 µg/m3 comme le recommande l’Organisation Mondiale de la Santé afin de permettre une réelle amélioration de la santé de la population européenne. De nombreuses études scientifiques ont mis en évidence les dangers des particules fines. Ainsi, dans une étude de Sylvia Médina, qui comparait différents scénarios d’exposition d’une population âgée de plus de 30 ans de 26 villes européennes, le nombre de décès évitables chaque année est évalué à 4.400 pour une teneur en particules fines de 25 µg/m3, à 7.300 pour 20µg/m3 , 13.200 pour 15 µg/m3 et 22.000 pour 10 µg/m3. Quel argument plus convaincant que ces chiffres pour élaborer une législation ambitieuse?

Malheureusement, cela n’a pas suffi. C’est finalement le niveau de 20 µg/m3 en zone urbaine pour 2015 qui a été retenu pour les PM-2,5, avec un plafond de 25 µg/m3 et une obligation de réduction de 20% de ces molécules entre 2010 et 2020. Ouf, tout de même un élément positif.

En ce qui concerne les PM-10, nous ne pouvons que déplorer l’absence de renforcement des normes et le report du délai d’application de trois ans à compter de l’entrée en vigueur de la directive, soit mi-2011. Néanmoins, ce délai est assorti d’une condition de pleine mise en oeuvre de la législation communautaire applicable, dont la directive IPPC.

L’objectif de la stratégie thématique visant à réduire de 40% les décès prématurés liés à la pollution atmosphérique est donc sérieusement mis en péril. Les dispositions complémentaires, comme la proposition législative de décembre 2007 visant à renforcer l’efficacité de la législation sur les émissions industrielles et celle sur la limitation des émissions d’échappement provenant des moteurs de véhicules utilitaires lourds seront bien nécessaires….

Valérie Xhonneux

Anciennement: Santé & Produits chimiques