GIEC comprend plus rien…

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Oyez, oyez, bonnes gens ! Le très honorable et honoré GIEC (Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat) a présenté ce 2 novembre à Copenhague un nouveau rapport constituant la synthèse des trois évaluations thématiques réalisées depuis septembre 2013 : preuves du réchauffement ; impacts ; mesures pour limiter la hausse de température. Sans surprise puisque rien n’est véritablement inédit, il en ressort que le climat va mal, très mal, de plus en plus mal. Mais pas de panique : on garde la situation en mains. « Il est possible de protéger le climat et de garder cette température dans des seuils non dangereux » dixit le très estimable et très estimé Professeur Jean-Pascal van Ypersele[[Interview sur La Première, RTBF Radio, lundi 3 novembre 2014]], ci-devant vice-président – et ci-derrière candidat président – du GIEC.
Eh non, peut-être le crûtes-vous mais vous vous trompâtes : le malade n’est pas incurable. Il convient juste de ne plus trop attendre pour faire tomber la fièvre du CO2 et l’écosystème planétaire retrouvera son équilibre. Autrement dit, tout va très bien, Madame la Marquise.

Je l’avoue, personnellement, j’ai failli douter, sombrer dans le pessimisme, croire qu’il est déjà trop tard, trop tard pour tous les cieux[[© Librement inspiré de Francesco Barracato, aka Frédéric François, 1970]] mais non : « Il est possible de protéger le climat et de garder cette température dans des seuils non dangereux ». Alleluia ! Bless the Lord ! Homme de peu de foi que j’étais…

Je revendique toutefois le droit aux circonstances atténuantes. Cela fait en effet des décennies qu’on répète qu’il y a urgence, qu’il faut agir sans délai, que « notre maison brûle et nous regardons ailleurs »[[Jacques Chirac au Sommet de la Terre de Johannesbourg en 2002]] ; chaque Sommet sur le Climat est présenté comme une ultime occasion à ne pas manquer « sinon… » (points de suspension augurant du pire), le climax ayant été atteint à Copenhague en 2009 où, à en croire l’unanimité, ce devait être « maintenant ou jamais ». Ce ne fut pas maintenant, j’ai légitimement cru que ce serait jamais. Et puis voilà que cinq ans plus tard, alors que le mal atteint des sommets et que le désaccord sur son traitement est plus grand que jamais on annonce une Xème rémission : pour autant qu’on agisse aujourd’hui – voire demain ou après-demain – il serait encore temps de sauver le malade ! Avouez qu’il y a de quoi tourner maboule ou à tout le moins sceptique…

D’accord, à moins d’un mois de « the 20th session of the Conference of the Parties and the 10th session of the Conference of the Parties serving as the Meeting of the Parties to the Kyoto Protocol » qui se tiendra à Lima du 1er ou 12 décembre, une sortie du GIEC proclamant, en substance, « on est dans la merde, on peut encore espérer ne pas s’y noyer mais il faudra par contre apprendre à vivre en pataugeant dedans » aurait cassé l’ambiance. Je doute d’ailleurs que la diplomatie onusienne lui permette une telle franchise.
D’accord encore, même si l’affaire est pliée et emballée, à quoi bon saper les quelques bonnes volontés existantes et celles qui viendraient à se déclarer en actant un échec ? Si on ne peut plus faire de bien, on peut encore essayer de limiter le mal.
Le problème, c’est qu’avec leur discours trop politiquement correct, leur volonté de ne pas désespérer Billancourt et leur optimisme niant la raison – plus grand monde ne croit encore sérieusement en la possibilité de maintenir effectivement le réchauffement global à l’horizon 2100 sous le seuil des 2°C –, les éminents experts donnent vraiment l’impression de nous prendre pour des cons et, plus grave, finissent par rendre leur message inaudible. Pour désintéresser et démobiliser les foules, leur stratégie à la « Pierre et le loup » s’avère plus efficace que n’importe quelle démonstration d’un climato-sceptique.

A cet égard, si Monsieur Jean Jouzel, brillant climatologue-glaciologue membre du GIEC, pouvait définitivement renoncer à toute intervention médiatique, il servirait grandement la cause climatique tant chacune de ses sorties brouille et déforce le message. Intervenant ce dernier dimanche sur France 2[[Le 20 heures du 2 novembre 2014]], il expliqua ainsi que « si la tendance actuelle se prolonge sur plusieurs siècles voire à l’échelle d’un millénaire, on pourrait assister à la fonte totale du Groenland et une montée des eaux pouvant atteindre 7 mètres. Donc, c’est sérieux. » Certes et indéniablement, c’est sérieux. Sauf qu’il apparaît pour le moins compliqué de conscientiser une population à des enjeux portant sur un millénaire. Peu de citoyens-électeurs agissent et votent en fonction de la situation qui existait aux alentours de l’an 1000 ou risque d’être en 3014. Qui sait d’ailleurs jusqu’où le génie humain aura repoussé les frontières du possible à cette échéance ?
Peut-être l’humanoïde sera-t-il devenu amphibie. Doté de poumons d’acier insensibles aux particules fines et autres saloperies, il en sera arrivé à métaboliser et valoriser ces substances jadis toxiques. Les nanoparticules circulant dans ses vaisseaux le protégeront contre tous les maux et toutes les attaques d’une nature hostile. Et si la Terre est devenue trop moche et trop pauvre pour ses ambitions, il aura colonisé Mars, Venus et la Lune en attendant Pluton. Qui sait… ?
Tant qu’à ne plus rien avoir de crédible, pourquoi ne pas s’inventer soi-même la suite de l’histoire…

« Il est possible de protéger le climat et de garder cette température dans des seuils non dangereux. » Trente ans qu’on fait le contraire de ce que l’on devrait et tout reste possible… Dont acte. Mais alors, pourquoi se prendre la tête et se contrôler les comportements ? Autant considérer, à l’instar de quelques philosophes et politiques scientistes, que le « dangereux » d’aujourd’hui ne sera plus celui de demain. Don’t worry, be happy… Si l’avenir appartient aux générations futures, n’essayons pas de leur imposer notre vision et nos solutions made in XXIème siècle, laissons-leur l’opportunité de donner libre cours à leur faculté d’adaptation à un monde qui aura peut-être changé, et alors ?

Finalement, ce n’est pas désagréable, le positivisme… Surtout quand on ne sera plus là pour voir si c’était également efficace.

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