La Wallonie bientôt à sec ?

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L’année 2011 a été assez remarquable d’un point de vue météorologique sur plusieurs points :

 elle restera dans les annales comme ayant battu le record de la température moyenne annuelle à Bruxelles-Uccle. La température moyenne annuelle a atteint 11,6°C, soit 1,1°C au-dessus de la valeur moyenne sur la période 1981-2010 (c’est-à-dire la valeur « normale »). Cette valeur est aussi 0,1°C au-dessus du précédent record qui datait de 2007 et 0,2°C au-dessus de la valeur de 2006 ;

 le printemps fut remarquable avec un ensoleillement « très exceptionnel » et une longue période de faibles précipitations ;

 enfin, on a pu relever un déficit de précipitations au cours du mois de novembre, un nombre record de jours d’orages dans le pays au cours du mois de décembre (11 jours, pour une valeur normale de 3), les orages dévastateurs durant l’été qui furent à l’origine des inondations à répétition dans la région de Orp-Jauche ; et, last but not least, entre fin septembre et début octobre, une période très douce, pour ne pas dire estivale.

Nous retiendrons ici l’une des conséquences les plus inquiétantes de cette météo : 2011 a vu des niveaux d’eau très bas, aussi bien dans les rivières que les nappes phréatiques.

Le changement climatique déjà en marche, et que les processus de négociation internationaux ont un peu de mal à juguler, aura des conséquences sur le cycle de l’eau, en Wallonie comme ailleurs. Si on est « spontanément » plus impressionné par les précipitations plus importantes et plus violentes et par les crues qui pourraient en découler, on ne doit pas oublier l’autre extrême: le risque de sécheresses plus fréquentes.

L’Agence Européenne pour l’Environnement avait déjà classé la Belgique parmi les pays les plus utilisateurs d’eau. En l’occurence, son calcul prenait aussi en compte l’eau de refroidissement que la Belgique utilise en proportions plus importantes que d’autres pays européens, ce qui a incité certains acteurs à relativiser l’information. Mais les modélisations effectuées par la Commission Européenne dans le cadre de l’évaluation de la politique de l’eau (le futur Blueprint attendu pour fin 2012) viennent confirmer que le problème ne vient pas que de l’eau de refroidissement.

La carte ci-dessous présente le Water Efficiency Index[[Le WEI se calcule comme le rapport entre les prélèvements totaux d’eau douce et le volume d’eau renouvelable]] en Europe en 2050 pour deux scénarios opposés. L’un (Economy First) se base sur un développement européen basé sur l’économie de marché dérégulée: les modes de vie ne changent pas et la consommation d’eau ne baisse donc pas. Dans l’autre (Sustainability Eventually), au contraire, les modes de production et de consommation permettent de diminuer la consommation d’eau des individus et des industries. Le verdict est sans appel: dans le premier scénario, le WEI supérieur à 40% indique que l’eau devient une denrée précieuse et soumise à de fortes pressions en Wallonie. Le deuxième scénario permet quant à lui de réduire cette pression à un niveau acceptable.

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Les raisons de cette pression en Wallonie ? Ces scénarios excluent cette fois d’office le poste relatif au refroidissement des centrales de production d’énergie (73% de la consommation d’eau en Wallonie). Restent donc la consommation d’eau des ménages, mais aussi la pression de l’industrie et, dans une moindre mesure, de l’agriculture. Ainsi en 2007, l’industrie et l’agriculture étaient responsables ensemble de 12% des prélèvements d’eau (de surface et souterraines, combinées) contre 15% destinés à la distribution publique[[Données du Tableau de Bord de l’Environnement Wallon, 2010]]. Et là, ce sont essentiellement nos modes de productions et de consommation qui vont devoir indubitablement changer ! On voit donc comment un développement économique non encadré peut générer des conséquences sur dans des domaines auxquel on pense peu : une eau devenue plus rare.

Après le plan PLUIES, faudra-t-il prévoir un plan sécheresse? Le changement climatique conjugué à un développement économique dérégulé pourrait en tout cas bien mettre en péril cette ressource que l’on juge souvent, mais à tort, très (voire trop) abondante en Wallonie. Il ne suffira pas de fermer nos robinets, il faudra encore modifier les comportements de tous, et des industries en premier, pour ne pas se retrouver tous à sec un beau matin d’été.