Nouveau cap pour la PAC. Pour que nos enfants ne nous accusent pas !

  • Auteur/autrice de la publication :
  • Post category:Agriculture
  • Temps de lecture :4 min de lecture
You are currently viewing Nouveau cap pour la PAC. Pour que nos enfants ne nous accusent pas !

Le film « Nos enfants nous accuseront », au-delà du titre quelque peu provocateur, relate l’histoire vécue d’une collectivité locale qui a fait le choix d’une alimentation saine et d’une agriculture de qualité ancrée dans son terroir. Et ça marche ! Une séquence y présentait un responsable de FAO qui suggérait explicitement une utilisation alternative des subsides de la PAC. Enjeux…

Après la révision à mi-parcours de la Politique Agricole Commune – le bilan de santé de la PAC -, l’agriculture revient au centre des débats avec le budget européen qui se décidera dès 2010 et la mise à plat de la PAC prévue pour 2013. S’il est peu probable que ces nouvelles étapes aboutissent à une réforme en profondeur, il importe de souligner les multiples échecs de la politique agricole européenne et de proposer de nouvelles politiques plus prometteuses, notamment celles qui viseraient à réorienter une partie des budgets au profit du financement de la restauration collective pour soutenir la demande en produits de proximité de qualité.

L’échec de la PAC est évident : diminution continue du nombre d’agriculteurs, dégradation des sols, érosion importante de la biodiversité, exception agricole au principe du pollueur-payeur, résidus de pesticides dans les fruits et légumes,… Ces constats, le bilan de santé n’a pas voulu les voir. Ils sont inhérents à une agriculture qui s’est découplée de son territoire, tant en termes de consommation que de production.
Les aides agricoles sont aujourd’hui déconnectés des plus-values sociales et environnementales. Elles incitent même à toujours plus de gigantisme au détriment de l’emploi, de la qualité de la vie et de l’environnement. Des effets pervers que les transferts vers le second pilier, celui du développement rural, n’arrivent pas à corriger, surtout quand la plupart de ces transferts sont, comme c’est le cas dans notre région, destinés à promouvoir les investissements agricoles.

Il est pourtant fondamental que ces aides dont la légitimité pose question soient réorientées vers les productions de qualité et de proximité afin de répondre aux nombreux enjeux sociaux et environnementaux en lien avec l’agriculture et l’alimentation. Cette remise en question ne vise pas à détourner ces aides de l’agriculture mais à les y ramener par le biais de la demande, celle des marchés locaux de la restauration collective par exemple. Cette dernière représente en effet un « marché » important, capable de créer un effet d’appel susceptible de réorienter la production agricole vers la fourniture en produit de qualité des marchés locaux. Mais pour cela, il faut également réorienter la restauration collective vers une alimentation durable. Un lien qu’il est possible de stimuler par une utilisation plus judicieuse des budgets de la PAC orientée vers la structuration et le financement de telle filière au niveau local. Le développement de filières locales, articulant la production et la consommation à l’échelle des territoires, en faveur d’une agriculture de qualité constitue une réelle opération gagnant – gagnant entre l’agriculture et la société.

Le transfert des aides du premier pilier au profit des filières locales peut même contribuer, par le biais de leur plafonnement et d’une modulation complémentaire basée sur les emplois existant, à atténuer les effets pervers de la PAC. L’enveloppe ainsi concédée offrirait des moyens concrets pour financer la demande de la restauration collective en produits de qualité et de proximité (produits biologiques, produits de l’agriculture durable ou labellisés). Une demande qui peut être stimulée rapidement par le greening des marchés publics de la restauration collective. La mise en place de contrats entre les parties prenantes d’un territoire (agriculteurs, filières, collectivités, associations environnementales) permettrait une rémunération des producteurs par les prix tout en internalisant les enjeux du territoire. Elle serait aussi l’occasion de favoriser la mise en place de plateformes d’achats décentralisées de taille suffisante pour commercialiser les produits alimentaires locaux dans le cadre de circuits courts. Une telle forme de soutien serait également une incitation à produire dans le respect des écosystèmes et de la biodiversité tout en tenant compte de la spécificité et de la diversité des terroirs.

Développer ces filières permet également de s’attaquer à un autre enjeu de taille, celui des maladies liées à la malbouffe et à la surabondance alimentaire, et dont les solutions reposent sur une sensibilisation qui commence dès le plus jeune âge, à travers la restauration collective par exemple.

Lionel Delvaux

Anciennement: Nature & Ruralité