Avis des ONG environnementales sur l’avant-projet de Plan Fédéral pour le Développement Durable

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A l’occasion de l’enquête publique sur l’avant-projet de Plan fédéral pour le développement durable, qui s’est tenue du 1er mai au 30 juin 2008, les 4 fédérations régionales d’associations de protection de l’environnement expriment l’avis repris ci-dessous.

Résumé exécutif

1.1.Les fédérations demandent :

A) Plus de cohérence

Les plans fédéraux pour le développement durable se succèdent et l’on s’attendrait à une continuité et une cohérence entre les actions des plans précédents et celles du nouveau plan. Alors que les deux premiers PFDD n’ont été que partiellement mis en oeuvre, le 3e PFDD est sur le point de voir le jour. Il serait utile que ce 3e plan donne une vue d’ensemble des deux précédents plans, ainsi que des actions réalisées, en voie de l’être et celles qui ont été abandonnées. De même, les contributions provenant du Printemps de l’environnement, autre exercice de consultation s’étant déroulé simultanément à celui sur le projet de Plan fédéral pour le développement durable, devraient être intégrées au plan, de manière à l’enrichir de mesures concrètes et de propositions de coordination de la politique fédérale et régionale. Enfin, les fédérations regrettent que l’intégration et la convergence des politiques thématiques (par exemple, le Plan mobilité) avec le Plan fédéral de développement durable ne soient pas mieux explicitées et, dans les faits, concrétisées.

B) Un engagement politique

Le développement durable ne peut relever de la responsabilité d’un seul ministre, mais doit être une priorité du Gouvernement tout entier. Une meilleure articulation du calendrier des élections et de la conception des PFDD, tout comme l’intégration des actions du Plan fédéral pour le développement durable dans les accords de gouvernement sont souhaitables. Enfin, ce 3e PFDD ne propose essentiellement que des actions destinées aux compétences fédérales, faisant rarement référence aux actions possibles avec les entités fédérées, or cette coordination est indispensable.

C) Des objectifs et un calendrier de réalisations des actions du PFDD

La concrétisation effective du plan se heurte à l’’absence d’objectifs d’une part et, d’autre part, de mention des responsabilités, des moyens financiers et humains nécessaires ainsi qu’un calendrier avec des échéances précises. Ces informations, tout comme les lignes budgétaires, devraient figurer dans le plan, dans un soucis d’efficacité et de transparence vis-à-vis du public. Un tableau de bord d’indicateurs est nécessaire pour l’analyse et le suivi des tendances non durables et planifier en conséquence les politiques et évaluer leur impact.

1.2. Analyse des actions proposées

L’avis passe en revue l’ensemble des thématiques et actions proposées. Les 4 fédérations souhaitent mettre en exergue les éléments suivants :

A) Les valeurs

Une réflexion sur les valeurs, quel que soit leur type, nous paraît pertinente, dans la mesure où les mécanismes et les stratégies qui les créent et les hiérarchisent sont également considérées. Ainsi, il est inutile d’aborder le problème de la surconsommation, sans considérer l’impact de la publicité sur nos modes de consommation. Mais plus qu’une réalisation d’un état des connaissances, c’est une définition de la notion de bien-être même qui doit être abordée.

B) La fiscalité

Une fiscalité verte forme la clé de voûte d’une politique performante en matière d’énergie, de protection du climat et de préservation des ressources naturelles. Mais les instruments utilisés pour la mettre en oeuvre ne doivent pas se réduire à la mise sur pied de groupe de travail ou la réalisation d’études. C’est une réforme fiscale complète qui doit être envisagée, à savoir instaurer une baisse de la fiscalité sur le travail en la compensant par une hausse de la fiscalité sur les produits polluants ainsi que sur l’utilisation des richesses naturelles et de l’énergie. La réussite d’une telle réforme fiscale nécessite une planification structurée, une mise en oeuvre progressive et clairement annoncée et la prise en compte des impacts sociaux.

C) Des indicateurs de développement durable

L’orientation des politiques grâce à des indicateurs permettant l’évaluation du bien-être pour tous à long terme est fondamental. De nombreux séminaires, documents, communications existent déjà en la matière. De même, un indicateur environnemental synthétique, efficace, simple et universel existe déjà: l’empreinte écologique. Il est nécessaire que la Belgique mette rapidement en oeuvre les moyens permettant de placer l’empreinte écologique à un niveau de suivi, de décision et de contrainte le plus haut possible, et ce tant au niveau européen, fédéral que régional.

D) Vers des modes de production et de consommation durable

L’information et la sensibilisation des consommateurs sont de largement insuffisantes à réorienter les modes de production et de consommation qui caractérisent notre société. Pour les réorienter, les autorités disposent de plusieurs outils dont la fiscalité, incontournable pour que les prix des produits et services intègrent les externalités environnementales et en terme de santé publique. Les autres outils sont d’une part le greening des marchés publics, puissant levier puisqu’il représente 11 à 16 % du PIB, et d’autre part, le développement des éco-technologies.

En matière d’information des consommateurs, un étiquetage environnemental serait à mettre résolument en ½uvre (contenu en CO2, efficacité énergétique etc.).

Les 4 fédérations demandent également des mesures fermes en matière de publicité : limiter la déductibilité fiscale des dépenses publicitaires, réglementation stricte pour les produits les plus problématiques, interdiction pour certains produits tels les pesticides, les vols low-costs.
En ce qui concerne la consommation de bois, une mesure que proposent les 4 fédérations est l’augmentation de l’offre de bois labellisés dans le secteur de la distribution.

E) Des agrocarburants durables ?

L’évaluation de l’impact des biocarburants est judicieuse. La mise en ½uvre de la deuxième mesure « Promotion d’une production durable de biocarburants » doit être conditionnée aux résultats de l’étude d’impact. Des mesures très strictes de limitation des importations de agrocarburants dans l’UE doit être visée, afin d’éviter les menaces sur la souveraineté alimentaire et sur l’environnement tant des pays du sud, que dans nos régions.

F) S’adapter aux changements climatiques

On peut déplorer que sur le plan de l’énergie le défi associé aux pics de production du pétrole ne soit pas directement abordé. L’augmentation structurelle des cours du baril de pétrole a et aura des répercussions sur notre mode de vie, qui rendent plus que jamais indispensable la mise aux points de politiques de maîtrise de la demande énergétique. La transition vers une économie sans carbone doit être organisée et gérée: tout retard ne peut qu’accroître les tensions sociales et économiques.

G) Transports et mobilité

La mobilité est plus que jamais un sujet de préoccupation. D’une part, ses incidences sociales, économiques et environnementales sont perceptibles à toutes les échelles, et d’autres part, elle intervient dans deux dossiers majeurs qui détermineront l’orientation de nos sociétés au cours de ce siècle: les changements climatiques et la survenue du pic de production du pétrole. Il est indispensable que les autorités fédérales ouvrent la voie vers un changements radical de notre système de mobilité, en agissant, par ordre de priorité, sur: la réduction de la demande de mobilité; le transfert vers les modes moins polluants; l’efficacité énergétique.

H) Une meilleure santé grâce à l’alimentation

Sur base des connaissances actuelles, les autorités peuvent d’ores et déjà décider, sur base aussi du know-how des acteurs de terrains compétents en la matière des critères essentiels à promouvoir au niveau de la restauration collective, que ce soit au sein des administrations (fédérales) que dans les collectivités (hôpitaux, homes, écoles…).

La consommation de viande étant trop importante par rapport à nos besoins, sachant les effets délétères sur la santé et l’environnement de cette surconsommation, les autorités pourraient développer des mesures décourageant l’achat de viande, par le biais notamment de mesures fiscales et des mesures en matière de formation.

D’autres mesures sont également requises telles que par exemple une taxe environnementale sur l’utilisation des pesticides (en particulier à usage privé) et un renforcement des contrôles de l’AFSCA quant aux teneurs en résidus dans les aliments.

Canopea