Baignade en eaux troubles

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La qualité des eaux de baignade fait l’objet d’une législation européenne visant leur qualité et notamment leur propreté, protégeant donc la santé des baigneurs. Ainsi, une première directive (1976/160/CE) fixe les critères minima de qualité auxquels doivent répondre les eaux de baignade, selon des paramètres à la fois biologiques, chimiques et physiques. Il est vite apparu que la pollution d’origine biologique était le facteur limitant de la qualité des eaux de baignade, et que l’origine était à chercher dans l’activité humaine (en particulier les bactéries fécales présentes dans les eaux usées et dans les rejets de l’agriculture). C’est pourquoi en 2006 l’Union Européenne a adopté une nouvelle directrive (2006/7/CE) qui non seulement modifie la liste des paramètres à contrôler en mettant l’accent sur les critères biologiques, mais qui prévoit aussi des mesures de gestion et d’information autour de ces zones de baignade, notamment via l’élaboration de profils de zones de baignade qui doivent identifier les sources de pollution possibles. Cette nouvelle directive a été adoptée en Wallonie en 2008, et est d’application depuis la saison de baignade 2010. Les rapports existants établis par la Commission Européenne se basent donc encore sur les anciens critères. Selon ces rapports[EEA report n°3/2010, Quality of bathing water – 2009 bathing season]], depuis 2008, la Belgique occupe la deuxième marche du podium… de la plus mauvaise qualité des eaux de baignade, avec 8,7% de ses zones ne remplissant pas les critères de la Directive 76/160 pour l’année 2009. Seule la Pologne fait pire avec 13,7%. Ce constat déjà affligeant empire lorsqu’on examine les résultats de la Wallonie. En 2009, sur les 36 plages wallonnes, 4 étaient interdites à la baignade pour cause de qualité insuffisante de l’eau lors des 5 dernières années[[La Directive Eaux de baignade impose aux États membres d’interdire à la baignade toute zone dont la qualité de l’eau aurait été insuffisante sur cinq années consécutives.]] et 11 autres étaient non conformes aux valeurs impératives[[Source: [http://aquabact.environnement.wallonie.be ]] soit un taux de non conformité de quelque 44%!

Des résultats peu suprenants

Plusieurs phénomènes peuvent expliquer ces résultats. D’abord, le fait que la majorité des zones de baignade de Wallonie se situent le long de rivières, qui récupèrent encore aujourd’hui les eaux usées en amont. Les lacs sont généralement mieux préservés de telles atteintes. Personne n’ignore que la Région a un retard considérable en matière d’épuration des eaux usées. En effet si les zones amont des zones de baignade sont prioritaires pour l’épuration, le retard est tel qu’à l’heure actuelle il reste encore à construire beaucoup de réseaux de collecte ainsi que les stations d’épuration dans lesquelles ils doivent déboucher. Le programme de la Société Publique de Gestion de l’Eau prévoit que ces investissements soient tous finalisés pour fin 2014. D’ici là donc, les eaux usées continueront à se déverser dans les rivières. Et la Région, déjà condamnée par l’Europe, s’expose toujours au risque d’avoir à payer d’importantes astreintes[[À titre illustratif, le non-respect de l’obligation d’assainir pour 1998 les agglomérations de plus de 10.000 équivalents/habitants et pour 2005 les plus petites pourrait coûter à la Wallonie 15 millions d’euros d’amende et 62.000 euros d’astreinte par jour de retard. Des montants non négligeables dans un contexte où l’austérité prédomine.]].

Cependant, le retard en matière d’épuration n’explique pas tout. Les zones de baignade sont souvent situées en milieu rural, et susceptibles d’être polluées par des déjections animales et par l’utilisation d’engrais à proximité des cours d’eau. A cet égard, un certain nombre de mesures peuvent être prises : clôturer l’accès aux cours d’eau pour le bétail dans toutes les zones amont de baignade, prévoir des bandes de végétation naturelle en bordure de rivières, interdire l’épandage d’engrais organiques à proximité des cours d’eau… autant de mesures agro-environnementales permettant de diminuer ou ralentir l’arrivée de polluants d’origine fécale dans les cours d’eau.
C’est donc un ensemble cohérent de mesures qui doivent être adoptées pour qu’enfin les eaux de baignade wallonnes soient propres et atteignent, à l’horizon 2015, à tout le moins le seuil de qualité « suffisante » tel que le prévoit la directive « Eaux de baignade” .

Une promotion touristique bien difficile

En juin 2008, La Fédération Inter-Environnement Wallonie a été agréée par la Foundation for Environmental Education (FEE) pour délivrer l’éco-label « Pavillon Bleu » aux zones de baignade et aux ports de plaisance wallons[Cf site [www.pavillonbleu.be ]]. Ce label d’excellence est délivré sur base de différents critères, depuis l’éducation à l’environnement sur la zone de baignade, jusqu’à la qualité de ces eaux, qui est d’ailleurs un critère obligatoire et exigeant: la conformité aux valeurs fixées par la législation ne suffit pas, il faut atteindre les valeurs guides de la directive 1976/160/CE, seuil atteint par seulement 3 zones de baignade en Wallonie en 2009… Dans ces conditions, il est difficile pour les gestionnaires des zones de baignades de prévoir des investissements parfois lourds (aménagement des plages pour les personnes à mobilité réduite, par exemple) alors que la qualité fluctuante de l’eau qui arrive de l’amont ne leur donne aucune certitude d’obtenir et de conserver le label Pavillon Bleu…

Extrait de nIEWs 91, (31 mars – 14 avril 2011),

la Lettre d’information de la Fédération.

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