Colloque « Cancers et environnement: mythes et réalités »: une suite critique…

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Voici un prolongement critique très intéressant de la niews précédente qui présentait les limites méthodologiques et scientifiques fixées par les intervenants et leurs résultats concernant les liens avérés entre cancers et environnement. En matière de santé Environnement, les préoccupations des associations, leurs positions et leurs réflexions trouveront prochainement une place privilégiée sur notre nouveau portail « sante-environnement.be ». Ce site en construction se veut collaboratif et constructif. Vous en saurez plus cet été. Mais en attendant, voici un article de M. Nejszaten de l’association Vivre… S de Seraing.

Dans la présentation du colloque, le ton était donné: « l’environnement ne cause pas plus de 1 à 2 % des cancers humains dans les pays industrialisés ». Il est vrai que certains intervenants se sont montrés plus réservés, comme Paolo Boffetta (Centre international pour la recherche sur le cancer, CIRC à Lyon) qui reconnaît l’absence de données sur les causes d’environ 65 % des cancers. Or, il se fait que le professeur Belpomme, l’initiateur de l’Appel de Paris (voir la pièce jointe ci-dessous), attribue à l’environnement un pourcentage semblable de cancers…

Le colloque a rassemblé plus de 130 médecins, presque tous des généralistes, à qui l’on a martelé que l’environnement est tout à fait accessoire – preuves scientifiques à l’appui – dans l’apparition des cancers. Cette position s’inscrit dans la vive polémique faisant rage en France entre, d’une part, le pr Belpomme et ceux qui partagent son analyse (parmi lesquels des prix Nobel et des centaines de scientifiques) et, d’autre part, des sommités médicales et autres farouchement accrochées aux 1 à 2 % de causes environnementales pour les cancers.

S’il est vrai que le lien direct entre un produit chimique (ou un facteur environnemental déterminé) et un cancer tel le cancer du sein ou le cancer du côlon est rarement établi actuellement, de nombreux arguments établissent sans conteste une lourde responsabilité de l’environnement, particulièrement les produits chimiques, dans l’évolution en hausse des cancers. Le « flagrant délit » est moins fréquent quand une maladie met quinze à vingt ans pour se déclarer, quand les causes peuvent être multiples et provenir d’innombrables synergies possibles, puisque nous sommes exposés à des milliers d’agresseurs potentiels présents dans l’air, dans l’eau, dans les aliments, dans le lait maternel, dans le corps de la mère, dans le sperme du père, etc. Une accumulation de présomptions n’est-elle pas suffisante pour condamner ?

De nombreux pesticides ont été interdits après que des organismes internationaux ont estimé qu’ils présentaient trop de risques pour la santé, beaucoup d’entre eux sont considérés comme des cancérigènes ou des cancérigènes possibles. L’intervenant, Philippe Autier (CIRC, Lyon), prétend qu’aucun pesticide « n’a été démontré carcinogénique chez l’homme » et il argumente en affirmant que « la littérature épidémiologique est saturée de résultats faussement positifs ». Exit les centaines d’études épidémiologiques et autres reconnaissant le caractère dangereux de nombreux pesticides et prises en considération par des organismes comme l’Agence de Protection de l’Environnement des Etats-Unis, la Communauté européenne et le Centre international pour la recherche sur le cancer.

Face à cette myopie justifiée par le « flagrant délit », le pr Belpomme réfute l’explication habituellement avancée à propos de la hausse des cancers [[Pr Dominique Belpomme, Guérir du cancer ou s’en protéger, Fayard, Paris, France, 2005.]]:
• le tabagisme et l’alcoolisme : ils sont en régression;
• le mode de vie : il faut un mutagène pour provoquer l’apparition d’un cancer; le stress, l’alcoolisme, l’obésité, etc. ne sont pas mutagènes par nature. D’autre part, comment expliquer l’augmentation des cancers des enfants ? Comment expliquer l’apparition des cancers chez les poissons et la prolifération des cancers parmi les animaux domestiques ?
• le dépistage précoce des cancers : les cancers du sein ont commencé à exploser avant le dépistage; celui-ci ne concerne (en France) que 30 à 40 % des femmes; ajoutons que, sans le dépistage, la maladie serait apparue et aurait été comptabilisée plus tardivement;
• l’espérance de vie plus longue, donc plus grand nombre de personnes âgées : les cancers sont en augmentation à tous les âges.

À l’appui de sa thèse, le Pr Belpomme précise que la pollution est la cause commune de nombreuses autres maladies (allergies, maladies dégénératives du système nerveux central, atteintes graves à la reproduction, etc.) et qu’a contrario, le rôle protecteur des fruits et des légumes bios est établi par de nombreuses études.
Dans notre brochure « Les apprentis sorciers de la chimie » [[Michel Nejszaten, Les apprentis sorciers de la chimie, éd. Vivre… S, Seraing, 2007. Cette brochure (170 pages A4) peut être obtenue en versant 8,50 ¤ (plus frais de port: 3 ¤ pour la Belgique et 8 ¤ pour la France) au compte n°068-2470104-26 de l’asbl Vivre… S, 16, place Cardinal Mercier 4102 Seraing (mettre l’adresse en communication); tél. 04/3366017 (IBAN: BE59 0682 4701 0426 BIC: GKCCBEBB). Télécharger: http://www.greenshop.be/fr/item.wws?sku=MIN002. Les personnes à faible revenu (chômeurs, minimexés, petites pensions…) peuvent l’obtenir par courriel.]] la mise en cause des produits chimiques a été menée en trois étapes :

1) La santé, notamment celle des enfants, est en déclin dans les pays industrialisés; à mettre en parallèle avec le déclin, voire la disparition, de nombreuses espèces animales à cause de maladies semblables: problèmes de la reproduction, cancers, maladies du système nerveux central, affaiblissement du système immunitaire.

2) Le corps humain (comme celui des animaux) est contaminé par de nombreux produits chimiques, dès l’embryon.

3) Les maladies provoquées par de nombreux produits chimiques,

 telles qu’elles ont été constatées au moyen d’études épidémiologiques chez les riverains d’usines frappées par un grave accident, dans certaines professions concernées (agriculteurs, travailleurs dans des entreprises chimiques, etc.) ou dans des populations,

 telles qu’elles ressortent d’études sur des animaux et sur des cellules,
présentent de grandes similitudes avec les nouvelles maladies et les anciennes revenues et plus virulentes.

Par conséquent, si un lien direct déterminé peut être contesté pour telle ou telle substance – la recherche, encore trop limitée sur les effets à long terme, nous réserve toutes sortes de surprises –, il n’est plus possible de nier les conséquences néfastes de nombreux produits chimiques (et d’autres facteurs environnementaux) sur les espèces vivantes.

L’enjeu est considérable, et il n’est pas surprenant que des sommités scientifiques reculent devant le choix de contester l’essentiel de notre mode de vie et de production, dans la mesure où la plupart des biens de consommation usuels présentent des risques pour la santé. Leur fabrication, leur contenu, leur transport, leur utilisation nécessitent l’emploi de produits polluants dangereux.

Il faudra sans doute beaucoup de temps avant que l’ampleur des problèmes de santé publique, surtout ce qui concerne les enfants, soit évaluée correctement. Pourtant, ces problèmes sont au moins aussi inquiétants que le réchauffement climatique: la disparition d’un grand nombre d’espèces vivantes, d’une partie appréciable de l’espèce humaine, est à l’ordre du jour [[La « Déclaration de Wingspread » de 1991, signée par 21 scientifiques américains, dénonçait les « altérations du développement sexuel induites par les produits chimiques: le sort commun des animaux et des hommes ». Un livre rédigé par deux des signataires et une journaliste scientifique a été publié en français sous un titre évocateur: Theo Colborn, Dianne Dumanovski, John Peterson Myers, L’homme en voie de disparition ?, Terre Vivante, Mens, France, 1997. Les auteurs estiment, à juste titre, que la perturbation de la reproduction constitue une menace encore plus grave que les cancers.]].

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