Directive « Qualité des carburants » : à deux doigts d’un vote de rejet…

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Ce mercredi 17 décembre, le Parlement européen a adopté la nouvelle directive sur la qualité des carburants (ou FQD pour Fuel Quality Directive). Le vote fut serré : 337 députés ont voté une résolution rejetant le texte en raison de ses faiblesses, 325 l’ont refusée et 48 se sont abstenus. La majorité qualifiée de 376 votes nécessaire pour que la résolution soit adoptée n’ayant pas été atteinte, la directive a donc été approuvée.

On peut tout à la fois se réjouir et se désoler de cette issue.

Réjouissons-nous : 337 députés ont clairement marqué leur désaccord par rapport à un texte estimé à raison comme quasiment vidé de toute substance (voir ici notre analyse détaillée du texte). Le signal envoyé à la Commission européenne est clair et fort : le Parlement réclame plus d’ambition. Il donne aussi une belle leçon de gouvernance au Conseil européen. Beaucoup plus réceptif aux arguments des groupes d’intérêts économico-financiers et s’apparentant plus à un lieu d’expression des égoïsmes nationaux que de construction de politiques communes au service de 500 millions de citoyens, le Conseil constitue régulièrement un frein par rapport aux politiques environnementales.

Réjouissons-nous aussi du fait que la directive présente quelques aspects positifs tels que l’obligation pour les compagnies pétrolières de faire rapport sur l’origine et le nom commercial de leurs produits, apportant un peu de transparence dans cette industrie opaque. S’il n’est même pas à moitié plein, le verre n’est tout de même pas complètement vide.

Mais désolons-nous, par ailleurs, de voir triompher de la sorte ceux qui, durant huit ans (la première proposition de la Commission européenne date de janvier 2007), et particulièrement ces cinq dernières années, ont mené un lobby acharné pour affaiblir le texte. Le Canada et certaines grandes compagnies pétrolières en tête « sécurisent » ainsi l’exploitation des hydrocarbures les plus sales (dont les tristement célèbres sables bitumineux). Ceci alors que l’humanité ne peut se permettre de brûler plus d’un tiers des réserves prouvées de combustibles fossiles avant 2050 sous peine de perturbations climatiques majeures.

Désolons-nous de voir anéanti le seul outil permettant d’orienter la consommation vers les pétroles dont l’extraction et la transformation sont les moins incidents sur le climat. Certes, on comptabilisera l’intensité d’émissions de gaz à effet de serre sur l’ensemble du cycle de vie pour chaque carburant. Mais une même valeur par défaut sera adoptée, quel que soit le carburant !

Espérons, enfin, voir les Etats membres se ressaisir au moment de la transposition de la directive en droit national. Ils ont en effet la possibilité d’imposer plus de transparence aux compagnies pétrolières, en les obligeant à rendre publiques (notamment) les origines précises de leurs produits. Les citoyens européens auraient ainsi enfin accès à une information qui leur est donnée pour le café qu’ils boivent ou le chocolat qu’ils mangent, mais qui leur est inaccessible pour le carburant qu’ils mettent dans leur véhicule.