Incinérateur de Givet : suite, mais pas fin

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La saga de l’incinérateur de Givet continue. Si vous souhaitez vous rafraîchir la mémoire ou simplement prendre connaissance de ce dossier, nous l’avons abordé à deux reprises déjà : ici et ici.

Suite à l’enquête publique, le rapport de la Commissaire enquêteur – chargée de vérifier la légalité de la procédure d’enquête publique, de résumer les réactions et d’émettre un avis – a été rendu publique et est disponible sur le site internet de la Préfecture des Ardennes. Beaucoup plus digeste que les documents soumis à enquête, ce rapport mérite une petite lecture, notamment ses conclusions. Mais attention, ô lecteurs, votre taux d’adrénaline risque de grimper dangereusement…

Sur la procédure, on y apprend que l’enquête publique a suscité une très large réaction des deux côtés de la frontière, avec :

  • 547 interventions individuelles écrites et verbales,
  • 13 dossiers d’associations ou de particuliers, brillamment argumentés
  • 2 réunions publiques rendues nécessaires
  • des articles de presse quasi quotidiens
  • une expertise citoyenne demandée et obtenue par les opposants au projet,
  • plusieurs pétitions belges qui ont rassemblé des centaines de signatures.

incinerateurmoyen.jpg Signalons tout de même que la Commissaire Enquêteur a complètement oublié de mentionner la réponse officielle du Ministre Henry, qu’on ne saurait considérer comme une intervention individuelle puisqu’elle se basait sur les enquêtes publiques en Wallonie, les avis des autorités communales, et l’avis du Conseil Wallon pour le Développement Durable.

On ne peut que saluer l’effort de toutes les personnes et associations ayant répondu à l’enquête publique, surtout lorsqu’on a parcouru le dossier rebutant par ses aspects techniques. La Commissaire note cependant « que près de 80 % des personnes qui ont émis des observations, n’ont jamais pris connaissance du dossier soumis à enquête, la question leur ayant été posée préalablement à chaque entretien ». On ne saurait trop en vouloir à ces personnes, même si ces chiffres ne peuvent représenter que la réalité du côté français de l’enquête, puisqu’en Belgique ce genre de question n’est normalement pas posé lors d’une réponse à une enquête…

En conclusion à cette enquête publique dont les réactions ont massivement été négatives, la Commissaire Enquêteur remet son avis… positif, sous conditions ! Regrettant « l’instrumentalisation de l’enquête publique faite par les opposants à des fins purement idéologiques et/ou politiciennes » et « la psychose qui s’est emparée de la population, révélateur de cette manipulation psychologique », elle estime qu’« il existe en France une « diabolisation » de l’incinération, qui fait suite aux mauvaises performances environnementales des installations, il y a plus de 15 ans. »

Or si les mauvaises performances des incinérateurs français sont une chose du passé (on l’espère), il n’en reste pas moins que les incinérateurs doivent rester le dernier recours pour chaque flux de déchets. Ce n’est pas un avis hystérique et manipulateur, mais l’exigence de l’Union Européenne auprès de ses Etats membres pour leur politique déchets d’ici à 2020, via la mise en œuvre de la hiérarchie des déchets. De plus, les flux que le projet prétend valoriser ne sont pas à l’heure actuelle, en Belgique du moins, mis en décharge mais au contraire valorisés en cogénération, ce que le projet de Givet ne garantit en rien puisque le projet de valorisation de la chaleur n’est pas finalisé.

Seule consolation : la Commissaire a assorti son avis positif de 26 recommandations : si une seule n’est pas respectée, son avis est défavorable au projet. Notons que cela reste un avis qui n’engage en rien la décision finale du Préfet des Ardennes. La procédure se poursuit donc avec la réponse du pétitionnaire[disponible en annexe 25 du rapport de la Commissaire. Une lecture critique est disponible dans le bulletin n°92 de l’association Nature et Avenir ([http://natureetavenir.free.fr/pages/dossiers.htm)]], l’avis de la DREAL (direction régional de l’environnement, de l’aménagement et du logement) et de l’agence régionale de santé (ARS). La décision finale du Préfet va donc prendre encore pas mal de temps à être prise sur base de ces avis.

Comme on dit, la suite au prochain numéro…

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