Le Plan Marshall au rapport: et le durable dans tout ça?

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Il y a quelques jours, le Gouvernement wallon a dressé le bilan de son « Plan Marshall ». Les politiques porteurs de ce plan ont affiché leur satisfaction devant des résultats jugés encourageants. Pour la Fédération, si une certaine dynamique a bel et bien été impulsée, le pilier environnemental y fait encore trop figure de parent pauvre en dépit de la prétention affichée Pourtant, malgré une volonté d’inscrire ce plan de relance dans davantage de durabilité.

Trois ans et demi après le lancement du Plan Marshall, l’heure est venue pour le Gouvernement wallon d’en tirer le bilan. Quels sont les résultats concrets de ce Plan articulé autour de cinq pôles de compétitivité? Qu’en est-il du nombre d’emplois créés ? Des aides octroyées aux entreprises ? De la stimulation apportée à la R&D et à la formation ? Du milliard d’euros investi ?

Pour réaliser cet exercice périlleux d’évaluation, deux acteurs ont été sollicités: un délégué spécial et une institution wallonne, l’IWEPS (Institut wallon de l’évaluation, de la prospective et de la statistique), lee premier étant chargé de vérifier la bonne tenue des dépenses, la seconde de vérifier la pertinence et le développement des projets subsidiés.

De cette évaluation, les ministres wallons retiendront les quelques 27.239 emplois créés, les 115.076 personnes mises en formation – dont 29.796 pour l’apprentissage des langues, les 1.250 nouveaux chercheurs engagés ainsi que les 893 millions d’euros investis par les entreprises dans les «zones franches»[[Certaines communes de Wallonie présentent d’importantes difficultés socioéconomiques. Afin de renforcer l’attractivité de ces zones défavorisées, Gouvernement wallon les a déclarées «zones franches» et y a développé un régime attractif afin d’inciter les entreprises à s’y implanter]].

L’envers du décor…

Nul ne peut contester ces chiffres. Néanmoins, ils ne peuvent nous cacher d’autres réalités, exacerbées dans le contexte actuel de crise.

Certes, le Plan Marshall peut se targuer d’avoir créer des emplois. Mais, dans un même temps, il ne faut pas oublier que le taux de chômage (et par là les faillites) reprenait sa course folle, pour atteindre les 14,4 % au mois de mars 2009, soit une hausse de 3,2 % par rapport à l’année précédente (évidemment, la morosité économique n’y est aussi pas étrangère).

Derrière ces emplois perdus, l’on retrouve des secteurs tels l’industrie pharmaceutique, l’ingénierie mécanique et le secteur agroalimentaire que le Gouvernement avait pourtant décidé de soutenir. Ce soutien n’aura manifestement pas réussi à booster ni même à préserver l’emploi… et encore moins l’emploi «vert», ce qui n’est pas vraiment une surprise lorsque l’on sait que les filières vertes sont quasi absentes des secteurs stimulés. «Quasi» puisqu’un un appel à projet spécifique «efficience énergétique» a tété lancé début 2008 à l’attention des pôles de compétitivité et des clusters; quelque 42 millions d’euros y furent dédiés sur un budget global de près d’un milliard d’euros et l’appel ne fut pas réitéré…

Ce désintérêt ne manque pas d’interpeller compte tenu des défis globaux (crise climatique, crise énergétique, crise alimentaire, etc.) qui s’imposent à nous mais aussi, à un échelon plus local, de la petite forme de l’état de l’environnement wallon. Pourtant, des filières telles la construction/rénovation durable, le secteur des énergies renouvelables ou encore celui des économies d’énergie ne manquent pas d’atouts, tant sur le pan économique que social qu’environnemental, avec notamment un potentiel de création de quelques 45.000 emplois.

Un Plan Marshall bis ?

La Fédération Inter-Environnement Wallonie avait qualifié de louable l’initiative du présent Gouvernement de relancer la machine économique wallonne; elle continue à soutenir cette volonté politique mais insiste plus que jamais pour que l’environnement fasse réellement partie intégrante de la mouture 2.0 du Plan Marshall, ce qui constituerait une reconnaissance de facto de la nécessité impérieuse de (ré)orienter notre développement économique vers une économie à faible intensité énergétique (réduction de la consommation des ressources naturelles, des matières premières, de l’énergie, de l’espace, etc.). Trop souvent, l’enjeu économique escamote la dimension environnementale des choses. Or, le développement durable suppose une parfaite égalité de traitement entre économie, environnement et social; ceci devrait transparaitre dans le prochain Plan de relance.

Il y a également lieu de s’interroger sur les indicateurs sous-jacents à une politique de relance. Au vu des limites manifestes des indicateurs économiques classiques tels que le PIB (en témoignent le changement climatique, les inégalités croissantes, le déséquilibre Nors-Sud et le chômage par exemple), il est important que d’autres indicateurs (tels l’empreinte écologique ou l’Indice de Développement Humain), garants des enjeux sociétaux, coexistent.

Enfin, la mise en place d’une telle dynamique ne peut à notre sens se passer de l’avis de la société civile dans son ensemble, défendant tantôt les enjeux économiques, tantôt les enjeux sociaux et tantôt les enjeux environnementaux. On ne peut continuer à faire plus longtemps abstraction de ces derniers.