Plan Wallonie cyclable 2.0 : l’avis mitigé du GRACQ

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La première version du plan Wallonie Cyclable datait de 2010, il était donc temps de lui donner une suite. C’est ce que le gouvernement wallon a fait ce 24 mars, dans une assez grande discrétion. Moins ambitieux que son prédécesseur, il se veut plus « efficace et pragmatique ». Mais se donne-t-il vraiment les moyens d’atteindre ses objectifs ?

Tout d’abord le GRACQ se réjouit que le Plan Wallonie Cyclable se poursuive, car le risque était réel de voir ce plan tout simplement abandonné !

A sa lecture nous notons positivement :

 le rappel de la volonté de prendre systématiquement en compte le vélo lors des réaménagements de voiries

 les efforts pour les déplacements à vélo en milieu scolaire (au delà du brevet du cycliste)

 la continuité du projet de vélo en entreprise (via « Tous Vélo Actif » ou autre)

 le soutien au développement du vélo à assistance électrique en Wallonie

 la systématisation d’opérations « 2 mois, 2 roues » pour mettre en selle des citoyens

 le développement des livraisons à vélo

 la reconnaissance du problème que constitue les vols de vélo

 la volonté manifeste d’étendre le stationnement vélo de qualité

 la systématisation des Sens Uniques Limités et les Céder-le-passage-au-feu-rouge

 l’intérêt de disposer d’une cartographie complète des infrastructures cyclables

 la coordination des trois ministres en charge du vélo (tous CDH)

 la nécessité de commencer d’abord par les noyaux urbanisés (plus grand potentiel)
Par ailleurs le plan intègre aussi certaines décisions déjà mises en oeuvre :

 les investissements renforcés dans le RAVeL et ses « chaînons manquants » (8 millions d’euro par an jusqu’en 2019)

 la nouvelle « gestion interne des projets routiers » de la DGO1 du SPW (intervention accrue de la Direction des déplacements doux)

 l’utilisation du « schéma directeur cyclable régional » comme outil d’aide à la décision en matière d’aménagements routiers 

Nous craignons cependant que la version 2.0 du plan n’atteigne pas l’objectif évoqué dès sa version 1.0, à savoir « améliorer fortement les conditions de la pratique du vélo et augmenter significativement son utilisation en Wallonie d’ici 2020 ».

Nos arguments en ce sens :

 Le plan privilégie « l’usage d’infrastructures légères et sécurisées » comme les marquages au sol, pour une approche « rapide qui permet de répondre à une majorité des attentes des usagers cyclistes ». On pourrait dire « usagers actuels » car on sait que les nouveaux usagers attendus sont eux bien plus en demande de sécurité, et que la simple peinture au sol ne les décidera guère à se risquer sur les routes wallonnes ! Ce que les citoyens wallons attendent surtout sont des infrastructures sécurisantes (souvent plus lourdes et coûteuses que la simple peinture…)

 Certaines mesures intéressantes ne sont pas accompagnées de propositions opérationnelles. On reste donc dans le flou pour leur concrétisation. Comme par exemple la « lutte contre le vol de vélo » ou la « mise en selle de travailleurs isolés » (non membres d’une entreprise « vélo active »). Idem pour « l’identité forte et l’image positive du vélo en Wallonie » ou le « soutien aux accompagnateurs bénévoles de vélobus dans les écoles ». Ensuite, quelle forme prendra le soutien régional aux vélos à assistance électrique ? Une prime ou un autre mécanisme ? Enfin le plan évoque la « simplification du paysage vélo en Wallonie » sans mentionner de mesures très concrètes. Vers quoi se dirige-t-on ?

 La concentration d’une partie des moyens sur dix communes cyclables pilotes disparaît, au profit des « crédits d’impulsion » auquel toutes les communes wallonnes disposant d’un Plan Communal de Mobilité (PCM) peuvent postuler. Même si les moyens se concentreront sur les zones urbanisées, à plus haut potentiel cycliste, on ignore encore les critères précis qui éviteront la dispersion des subsides d’aménagements.

 Au niveau de la concertation, la Commission vélo régionale, organe central pour un plan vélo efficace, ne s’est plus réunie depuis plus d’un an… L’administration régionale wallonne (SPW), qui dispose maintenant d’une expertise vélo, ne semble guère associée non plus à l’élaboration et à la concrétisation du plan. 

 Aucun budget n’est associé à ce plan. C’est un des inconvénients du plan Wallonie Cyclable 1.0 qui persiste dans sa version 2.0.

 Le plan arrive déjà tard dans la législature. Le ministre de la mobilité aura-t-il le temps de le concrétiser avant 2019 ?

 Disposer de statistiques fiables sur l’évolution de la part modale réelle du vélo en Wallonie est nécessaire pour mesurer l’efficacité du plan. Or cette question n’est pas résolue…

En conclusion, la version 2 du plan Wallonie Cyclable est une suite intéressante au plan 1.0,mais qui soulève beaucoup de points d’interrogation et de doutes quant à ses ambitions et son efficacité réelle.

Nous espérons cependant que le Ministre de la Mobilité entamera rapidement le dialogue avec les associations cyclistes pour sa mise en oeuvre, afin de lever les craintes et améliorer ce beau projet, très attendu par les cyclistes, pour la Wallonie.

Canopea