Primes « énergie-logement » : un accord en demi-teinte

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Le gouvernement wallon a adopté ce jeudi, en première lecture, une réforme en demi-teinte du système de primes « énergie-logement ». Si Inter-Environnement Wallonie salue la volonté de recentrer ces primes sur les classes moyennes et les ménages précaires, la fédération des associations environnementales regrette la confirmation de la réduction de 25 millions d’euros de l’enveloppe budgétaire consacrée à cette politique . Ce choix, qui limite fortement l’ambition d’une réduction structurelle de la consommation d’énergie dans le logement wallon s’avère contre-productif tant du point de vue environnemental que socio-économique.

Le texte de la réforme du système de primes « énergie-logement » adopté ce matin par le Gouvernement Wallon assure, et c’est une bonne chose, le renforcement de la majoration des primes, en fonction des catégories de revenus. Ce mécanisme, couplé à l’écopack, rend plus progressive les aides selon les revenus. Il permettra donc à un plus grand nombre de ménages d’entamer des travaux de rénovation à condition que les pouvoirs publics développent des procédures d’accompagnement pour aller chercher ces publics se trouvant dans une situation de précarité énergétique, ce qui n’est pas chose aisée.

Comparé à nos voisins européens, la performance énergétique du bâti belge est médiocre : sa une consommation énergétique est en effet 72% supérieure à la moyenne européenne. Selon les bilans énergétiques calculés pour l’ensemble de la Belgique, le chauffage est le premier poste de consommation d’énergie des ménages puisque 76% de la consommation sert à chauffer le logement. Or, 750.000 ménages, soit un septième de la population, sont dans une situation de précarité énergétique et n’ont pas les moyens de financer des travaux d’isolation pour réduire de façon structurelle leur consommation.

Le secteur de la construction est également un moteur économique pour la Région wallonne et la réduction de l’enveloppe budgétaire aura un impact sur un pan de notre économie déjà touché par la crise économique et qui a vu la disparition de 5000 postes depuis deux ans[[Confédération Construction Wallonne, « Moratoire sur les primes énergie : le secteur de la construction s’insurge ! », Communiqué de presse du 21 octobre juin 2014]]. Le soutien public à ce secteur est par ailleurs rentable pour les pouvoirs publics. Une analyse approfondie des impacts macroéconomiques des politiques publiques allemandes de soutien à la rénovation énergétique a permis de montrer que pour « 1 euro d’aide publique consacré à la rénovation thermique, l’État récupère entre 2 et 4 euros sous forme d’impôts et de coût évité du chômage à travers le seul accroissement d’activité »[[A. Rudinger, « Le tournant énergétique allemand : état des lieux et idées pour le débat français », Les cahiers de Global Chance, mars 2013, p.20]].

Quand on sait que selon les prévisions de la Commission européenne, « la Belgique ne devrait pas atteindre son objectif de 15 % en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre dans les secteurs non couverts par le système d’échange de quotas d’émissions de l’Union d’ici à 2020 » , il est urgent d’agir à la fois dans l’augmentation de la production de renouvelables mais prioritairement dans la réduction structurelle de la consommation et l’amélioration de l’efficacité énergétique.

En ne remettant pas en cause la diminution de l’enveloppe budgétaire, le gouvernement wallon a donc manqué une occasion de mettre en place une politique publique indispensable dans la lutte contre la précarité énergétique et les changements climatiques, créatrice d’activité économique et bénéfique pour l’environnement. Lors de son passage en deuxième lecture, le gouvernement wallon peut encore décider de renforcer les moyens alloués à cette véritable politique de relance. Il prendrait là une décision juste tant sur le plan environnemental que socio-économique.