Qualité des eaux européennes : au secours !!

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En 2000, l’adoption de la Directive-cadre Eau (DCE) semblait ouvrir une nouvelle perspective pour la qualité des eaux européennes, bien souvent malmenées, surexploitées, polluées. 10 ans plus tard, force est de constater que cette directive a encore bien du mal à s’imposer aux États membres, dont la Région wallonne… (cf notre analyse critique du 10 juin 2010)

En attendant que la Région wallonne ne sorte ses premières propositions de plans de gestion, jetons un oeil à ce que nos voisins plus « consciencieux » ont mis sur pied.

Le Bureau Européen de l’Environnement, coupole des associations de défense de l’environnement européennes, a évalué le degré d’ambition des 14 plans de gestion existant à cette date (sur les 26 prévus). Un critère de choix pour cette évaluation est la politique visant les nutriments (nitrates et phosphates): émis principalement par les ménages et l’agriculture; les nutriments sont responsables de l’eutrophisation, qui reste le principal défi des eaux européennes. C’est aussi un critère clé dans la DCE : toute masse d’eau (souterraine ou de surface) ayant des quantités trop importantes de nutriments est considérée comme n’étant pas en bon état. Or le bon état des eaux de surface doit être atteint pour 2015: il est donc critique que les pays européens adoptent des mesures ambitieuses pour réduire drastiquement cette pollution dans les temps.

Les conclusions du BEE n’incitent guère à l’optimisme. Les plans de gestion existants sont peu transparents: ils présentent des données lacunaires que les gouvernements rechignent à préciser, même à la demande insistante des ONGs. Ainsi sur les 14 plans existants, seuls 8 sont suffisamment détaillés pour être analysables. Ils montrent un lien fort entre pollution par nutriments et mauvais état des masses d’eau. Enfin, sur ces 8 plans, 2 ne mentionnent pas d’objectifs de réduction de la pollution par nutriments.

Restent donc 6 plans de gestion ayant une ambition (limitée) de gestion des nutriments, s’appuyant sur des mesures molles (éducation des agriculteurs, zones-tampons optionnelles…). Logiquement donc, aucun de ces plans ne prévoit la restauration totale de la qualité des eaux en nutriments pour 2015, préférant utiliser une possibilité d’extension des délais, normalement prévue comme une exception pour raisons économiques et/ou technologiques majeures! En moyenne, moins de 30% des eaux de surface en mauvais état devraient ainsi être restaurées pour 2015, le reste des efforts étant échelonnés jusque 2027 voire … à jamais. La principale raison invoquée pour cette procrastination massive? Les coûts, disproportionnés. Disproportionnés par rapport à quoi? Aucun Etat ne l’a précisé…

Note plus optimiste, les plans de gestion se montrent plus volontaires sur le problème de la modification physique des cours d’eau (barrages, déversoirs, unités de production d’hydroélectricité…) en vue de restaurer leur continuité écologique et d’y permettre notamment la migration des poissons. Cependant là encore, des exemptions ont été demandées en invoquant l’état actuel trop artificialisé de certains cours d’eau, qui empêcherait toute restauration de leur état initial.

Le BEE dresse donc un bilan franchement mauvais des premiers plans de gestion des bassins hydrographiques, tellement mauvais que plusieurs ONG n’ont pas hésité, dans différents pays, à envisager des recours légaux contre ces plans sur base de leur non-conformité aux objectifs de la DCE et de leur manque de justification dans les exemptions prévues.

La faiblesse des plans de gestion analysés est désespérante. Et la lenteur des progrès des restauration de la qualité est à leur image. Triste figure pour l’année européenne de la biodiversité !

Le rapport du BEE peut être consulté sur leur site web :
10 years of the water framework directive: a toothless tiger? – A snapshot assessment of EU environmental ambitions

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