Route : d’où vient le danger ?

  • Auteur/autrice de la publication :
  • Post category:Mobilité
  • Temps de lecture :6 min de lecture
You are currently viewing Route : d’où vient le danger ?

En novembre 2021, la Commission européenne publiait une analyse des décès sur la route en Europe. Le tableau de synthèse illustre de manière irréfutable cette évidence : les usagers dits « vulnérables » le sont effectivement face aux voitures et autres véhicules lourds motorisés. Le tableau met aussi en exergue cette réalité peu connue du grand public : plus de 40% des occupant.e.s de voitures qui perdent la vie sur la route sont tué.e.s dans des accidents n’impliquant pas d’autre véhicule.

22 800 personnes ont perdu la vie sur les routes de l’Union européenne en 2019. Les catégories d’usagers auxquelles appartenaient ces personnes forment les lignes du tableau publié par la Commission européenne ; les colonnes présentent le « principal véhicule » adverse (main vehicle en anglais) lors de la collision (en français, on préférera le terme « partie adverse »).

Usagers vulnérables ou de valeur ?

Sous l’acronyme VRU (vulnerable road user : usager de la route vulnérable) sont regroupés les piétons, cyclistes et conducteurs de cyclomoteurs (ou mobylettes en langage courant) et de motocycles (ou motos). Il apparaît directement que les collisions dans lesquels un VRU est impliqué :

  • causent peu de victimes chez les autres usagers de la route (4 premières colonnes du tableau) : 450 personnes (55 + 41 + 88 + 266), soit un peu moins de 2% du total ;
  • sont très dangereuses pour les VRU eux-mêmes (4 premières lignes du tableau) : 10 829 personnes (4 628 + 2035 + 613 + 3553), soit un peu plus de 47% du total (29% pour les seuls piétons et cyclistes).

Matthew Baldwin, coordinateur sécurité routière de la Commission européenne, plutôt que de « vulnerable road user » parle volontiers de « valuable road user » (usager de la route précieux ou de valeur) pour désigner les piétons et cyclistes, lesquels contribuent à diminuer le nombre de victimes de la route (tués et blessés graves et légers) et à améliorer son bilan environnemental.

Course à l’armement

Dans une collision impliquant au moins deux véhicules, les occupants du (des) véhicule(s) le(s) plus lourd(s) « s’en sortent mieux » que les parties adverses. Ainsi, les accidents impliquant au moins une voiture et un camion de plus de 3,5 tonnes se soldent par 26 tués chez les occupants de camions et 1 557 chez les occupants de voitures…

De l’observation qui précède, beaucoup de personnes tirent une conclusion dangereuse. Cette conclusion peut être résumée comme suit : si on est mieux protégé dans un véhicule plus lourd, j’achète une voiture aussi lourde que me le permet mon budget. Cette conclusion peut leur être fatale car le type de collision qui tue le plus est celui n’impliquant qu’une voiture (et pas de partie adverse) : 4 400 tués, soit plus de 19% du total des victimes de la route en Europe. Or, dans un accident de ce type, les voitures plus lourdes, dont le mouvement requiert plus d’énergie, peuvent aussi s’avérer plus dangereuses pour leurs occupants que les voitures plus modestes, qui dissipent moins d’énergie en cas de choc. Cette conclusion est aussi dangereuse pour la sécurité routière dans son ensemble : elle pousse les automobilistes dans une logique de « course à l’armement »1 où, pour se protéger des autres usagers, on met en circulation des véhicules plus dangereux.

Les modes actifs sont les plus sûrs

Les collisions n’impliquant que des piétons et des cyclistes (croisement des 2 premières lignes et des 2 premières colonnes du tableau) tuent 75 personnes par an en Europe, soit 0,3% du total. Les collisions entre piétons n’ont créé aucune victime en 2019. Par ailleurs, même si ce genre d’accident marque souvent les esprits, rares sont les personnes voyageant en bus et en car qui perdent la vie sur les routes européennes : 111 sur un total de 22 800, soit un peu moins de 0,5%.

Bien sûr, les éléments d’analyse qui précèdent sont parcellaires. Bien sûr, pour déterminer la dangerosité respective des différents modes de transport, il conviendrait de ramener les nombres de victimes au nombre d’usagers des différentes catégories et au nombre de kilomètres parcourus. Il n’empêche : le tableau publié par la Commission permet d’appréhender en un coup d’œil les modes de transport et les types de véhicules à promouvoir.

STOP… et GO ! pour LISA

Pour les déplacements des personnes, la voie à suivre tient dans l’acronyme néerlandophone STOP qui présente la hiérarchie souhaitable des modes de transport, laquelle commence par les piétons (Stappers), se poursuit par les cyclistes (Trappers) et les transports publics, collectifs et partagés (Openbaarvervoer) et se termine par la forme de mobilité la moins souhaitable, la voiture personnelle (Personenwagens). La voie à suivre tient également dans 4 petites lettres qui nous sont chères chez Inter-Environnement Wallonie et chez Parents d’Enfants Victimes de la Route : LISA.


Aidez-nous à protéger l’environnement,
faites un don !

  1. HOYE A. 2017. Road safety effects of vehicles crashworthiness, weight, and compatibility. Oslo: Institute of Transport Economics