Une absence remarquée au Salon de l’auto : les Lisa Car

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Le salon de l’automobile, grand-messe médiatique de l’industrie, bat son plein. Ce qui se fait de mieux et de plus récent y est exposé avec faste, au plus grand plaisir des amateurs en la matière. Une partie grandissante de la société civile est pourtant déçue : les préoccupations pour le climat , si elles sont présentes dans les discours, manquent cruellement de déclinaisons concrètes. Les Lisa Car sont ignorées. Explication.

De nombreuses études le montrent : au cours des dernières décennies, la masse (ou poids), la puissance et la vitesse de pointe des voitures neuves ont augmenté de manière très significative[1]. Et les ventes de véhicules présentant un « profil » de face avant « carré », inspiré de ceux des véhicules « tout terrain », ont explosé.

L’industrie automobile tait cette réalité et vante les efforts importants qu’elle déploie pour, d’une part, diminuer la consommation des véhicules et donc leurs émissions de CO2 subséquentes et, d’autre part, améliorer leur sécurité.

Malheureusement, les études les plus récentes montrent que tous ces efforts relatifs à l’amélioration technique de l’efficacité énergétique des voitures sont neutralisés par l’évolution d’autres caractéristiques, dont principalement la masse (poids), la puissance et le profil des véhicules[2]. En synthèse : les acquis des efforts en technologies sont sacrifiés sur l’autel des exigences marketing et économique.

Les dernières statistiques confortent ces constats : elles indiquent par exemple que les émissions de CO2 moyennes du parc automobile belge sont en augmentation depuis 2017 alors qu’elles diminuaient depuis 2000 (la tendance est la même en Europe) et que les parts de marché des SUVs ne cessent d’augmenter depuis 2010 pour atteindre aujourd’hui 39,1% (idem en Europe). La très sérieuse Agence internationale de l’Energie s’inquiète de ce qu’elle appelle un « changement structurel silencieux » qui aurait la forme d’un « dramatic shift towards bigger and heavier cars »[3] (un transfert dramatique vers des véhicules plus grands et plus lourds).

Figure : Emissions moyennes de CO2 des voitures neuves par pays et évolutions des parts de marché par catégories de voitures en Europe, source : ICCT European vehicle market statistics, ICCT, https://t.co/l0YHDVLT5x?amp=1

De manière semblable, les progrès en matière de sécurité routière ont tendance à marquer le pas depuis 2017. En 2018, on déplorait encore 604 tués sur les routes belges (l’équivalent d’un peu plus de 3 crashs d’Airbus a320 sans aucun survivant) et 3.636 blessés graves (dont plus de la moitié garderont des séquelles physiques et/ou psychologies à vie). Parmi les freins identifiés, outre l’effet des « distracteurs » (dont le GSM), il y a l’évolution… de la puissance, de la masse et de la face avant des véhicules : on n’en sort pas, les faits sont têtus.

Les ONG environnementales, de promotion des mobilités alternatives et de victimes des accidents de la route sont inquiètes face à ces évolutions et, depuis plusieurs années, proposent des pistes d’améliorations dont la plus aboutie est, en ce qui concerne l’automobile, la Lisa Car (Light and safe car).

Il s’agit d’un concept et d’un projet développé en 2014 par IEW et PEVR (Parents d’Enfants Victimes de la Route – SAVE asbl) qui a pour objectif la mise en place d’un cadre réglementaire limitant précisément la masse, la puissance et la vitesse des voitures ainsi que l’agressivité de leur face avant.

Il s’agit dont aussi de la promotion d’une voiture légère, raisonnablement puissante et rapide et au profil plus fluide. Sa motorisation sera de préférence électrique. Et elle sera partagée un maximum.

Ce concept bénéficie d’une reconnaissance de plus en plus importante auprès des autorités publiques et d’un nombre grandissant de membres de la société civile mais semble totalement ignoré par l’industrie automobile. Il va de soi qu’il n’a de sens que dans un contexte de maîtrise de la demande de mobilité automobile et de développement aussi rapide que possible des transports en commun et des modes actifs. L’urgence climatique n’autorise plus les tergiversations – non plus que l’hécatombe sur nos routes

Nous nous tenons à la disposition des autorités publiques, des représentants de l’industrie automobile et de la presse pour présenter ce concept innovant particulièrement adapté aux enjeux de notre société.

Pour en savoir plus :

Tout ce que vous désirez savoir sur les Lisa Car se trouve rassemblé sur un site dédié : https://www.lisacar.eu


[1] Respectivement de 10,2%, 32,4% et 7,2% sur la période 2001-2018 (valeurs moyennes calculées sur l’ensemble des voitures neuves vendues en Europe)

[2] Mass- and power-related efficiency trade-offs and CO2 emissions of compact passenger cars, Martin Weiss,Lukas Irrgang,Andreas T. Kiefer,Josefine R. Roth,Eckard Helmer, Journal of Cleaner Production, Elsevier, 10 January 2020© 2019 The Authors. Published by Elsevier Ltd. Résumé en français : https://www.canopea.be/industrie-automobile-et-deraison/

[3] Growing preference for SUVs challenges emissions reductions in passenger car market, by Laura Cozzi, Chief Energy Modeler, and Apostolos Petropoulos, Energy Modeler, 15 October 2019, https://www.iea.org/newsroom/news/2019/october/growing-preference-for-suvs-challenges-emissions-reductions-in-passenger-car-mark.html