Wallons et Bruxellois face à l’environnement (1) : plus concernés qu’ils ne le disent

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Du lundi 23 au vendredi 27 septembre, nous analysons pour vous un sondage commandé par IEW (avec le soutien de la Wallonie) sur la perception des enjeux environnementaux par les habitants de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Aujourd’hui, la place de ces enjeux dans les préoccupations générales de la population.

Entre 2009 – année de réalisation du sondage sur les enjeux environnementaux (commandité par « Le Soir ») qui nous sert de référence pour analyser l’évolution de l’opinion publique – et 2013, les choses ont radicalement changé.

En 2009, on surfait encore sur la vague du Pacte écologique signé par les politiques français et belges et du Prix Nobel du tandem Al-Gore-GIEC ; l’espoir d’un grrrrraaaaaannnnnd accord sur le climat au Sommet « de la dernière chance » de Copenhague excitait l’attention.

En 2013, la crise économique et ses conséquences sociales accaparent les unes des médias et des agendas politiques. Le problème climatique semble s’être dissipé dans l’air du temps en emportant avec lui la dimension collective des autres enjeux environnementaux. Un phénomène de délitement d’autant plus naturel que tous les acteurs concernés – en ce compris les ONG environnementales – semblèrent accepter avec une résignation désespérée et désespérante l’échec de Copenhague, rendez-vous (sur)vendu comme l’ultime occasion d’éviter « le pire ».

Il n’est pas étonnant, dès lors, que ce sondage millésime 2013 révèle un recul généralisé (voir résultats ci-dessous) des préoccupations strictement environnementales… qui ne sont d’ailleurs plus des « préoccupations » pour une majorité puisque

 la pollution est considérée comme telle par 50% des sondés (61% en 2009) ;

 l’environnement en général par 47% (53% en 2009) ;

 la biodiversité par 33% (40% en 2009).
La cerise sur le gâteau de la déconfiture revient aux changements climatiques qui ne préoccupent plus que 38% de l’échantillon contre 60% en 2009.

Les résultats témoignent de facto d’une forme de repli sur soi de la population, d’une primauté de la situation individuelle sur les enjeux collectifs. Ainsi, les thèmes arrivant en tête des préoccupations sont

 la santé : 78% ;

 le pouvoir d’achat : 67% ;

 la liberté d’expression : 66% ;

 la qualité de l’alimentation : 66% ;

 l’insécurité : 64% ;

 la précarité : 61% ;

 l’emploi : 61% ;

 le cadre de vie : 60%.
Aucun autre thème, pas même l’enseignement (49%) ni surtout les débats communautaires (28%), n’interpelle plus de la moitié des sondés.

Une analyse plus fine permet toutefois de mettre en exergue deux éléments qui viennent nuancer à la fois le désintérêt vis-à-vis des enjeux environnementaux et la fuite-refuge dans l’individualisme.

D’une part, même si elles ne sont pas identifiées comme telles, trois des huit préoccupations prioritaires des sondés apparaissent en lien direct avec l’environnement.
La santé dépend ainsi plus que jamais de l’environnement dans lequel nous évoluons. Les cancers, les accidents cardio-vasculaires, les troubles de la reproduction, le stress chronique pour ne citer que celles-là sont des pathologies dont on ne peut plus aujourd’hui objectivement nier qu’elles dépendent grandement de facteurs environnementaux. La pollution de l’air par les particules fines et autres composés organiques volatiles, de nos intérieurs par les perturbateurs endocriniens, de l’alimentation par les résidus d’intrants chimiques et/ou traitements aux antibiotiques sont autant de préoccupations qui se retrouvent de facto dans celle affichée envers « la santé ».
Il en va de même pour la qualité de l’alimentation et le cadre de vie qui élargissent encore l’éventail des enjeux environnementaux évoqués en creux.

Lorsque l’on prend la peine de mettre ces préoccupations prioritaires en perspective, de s’intéresser aux causes donnant naissance à ce que les sondés considèrent comme des problèmes, l’environnement retrouve donc une dimension essentielle. On peut/doit simplement regretter que ces liens semblent ignorés/négligés par les personnes interrogées… sans quoi « la pollution » fédérerait l’immense majorité des inquiétudes.

Par ailleurs, la hiérarchie des préoccupations exprimées laisse transparaître une émergence des enjeux individuels au détriment des combats collectifs.
La santé, le pouvoir d’achat, la liberté d’expression, la qualité de l’alimentation, l’insécurité, la précarité, l’emploi relèvent clairement d’une approche personnelle des problèmes considérés comme susceptibles de « ME » frapper. A contrario, la pollution, la situation économique, la mobilité, les tensions communautaires et communautaristes, l’environnement en général ou les changements climatiques s’inscrivent dans une dimension plus large par laquelle les sondés ne se sentent pas concernés.

Il y a indiscutablement là un vide « politique » – au sens le plus large et le plus noble du terme – qu’il importe de combler. Cela passe par un travail acharné d’affirmation à la fois de l’incapacité de résoudre valablement un problème sans s’attaquer à ses causes et du caractère indissociable de la préoccupation individuelle et du combat collectif. Cela passe aussi (et surtout) par le développement d’un projet politique susceptible de redonner à l’individu la foi en la finalité de son engagement collectif.

Fiche technique
Ce sondage commandé par Inter-Environnement Wallonie (avec le soutien de la Wallonie) a été réalisé par Dedicated entre le 28 août et le 5 septembre 2013 auprès d’un échantillon de 1.203 personnes représentatif des Wallons et Bruxellois âgés de 18 et plus.
La marge d’erreur maximale est de 2,8%.

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Retrouvez tous les articles relatifs à ce sondage :
1. « Plus concernés qu’ils ne le disent »
2. « Plus sensibles à la mobilité qu’au territoire »
3. « Voiture sacrée et transports publics à améliorer »
4. « Acceptabilité – … ou non – des mesures proposés »
5. « Prêts pour des « villes et villages 30 »